La pratique du swap est souvent l’apanage des préparateurs, mais parfois elle est de l’initiative des constructeurs. C’est le cas du concept V12 Vantage RS, présenté en 2007 par Aston Martin. Il s’agit d’une V8 Vantage, modèle le plus petit de la gamme (moins de 4,40 m), dont le 8 cylindres cède la place à un V12 6.0 de plus de 600 ch. Deux ans plus tard, la marque franchit le pas et commercialise cet engin à part. La V12 Vantage de série reçoit tel quel le V12 5.9 de 517 ch et 58 mkg de la DBS. Un bloc rentré au chausse-pied dans l’élégante Britannique mais, étonnamment, aucune adaptation majeure n’a été nécessaire.
Pour évacuer efficacement les calories, le capot désormais bombé est percé de multiples aérations. Les jupes latérales deviennent plus saillantes, une lame carbone apparaît à l’avant, et le becquet de coffre est allongé afin d’apporter plus d’appui. Pour ne pas dégrader l’aérodynamique, la caisse est abaissée de 15 mm. Avec la greffe d’un si gros coeur, apportant une charge supplémentaire de 100 kg, on aurait pu penser que la répartition des masses serait déséquilibrée. Mais grâce à l’implantation reculée du bloc et au rejet de la boîte mécanique sur le train arrière selon le schéma transaxle, la répartition du poids avant/arrière est de 51/49 %, contre 49/51 % pour la V8 Vantage. La petite Aston affiche ainsi un comportement remarquablement équilibré. Si la direction se montre un peu lourde compte tenu du monument mécanique qui appuie sur le train avant, il n’existe pas l’ombre d’un sous-virage et le nez ne manque jamais la corde, tandis que l’arrière se place gentiment. Ce comportement exceptionnel est le fruit du gros travail des ingénieurs sur les trains roulants. Outre l’abaissement, les ressorts sont affermis de 45 % et le diamètre des barres antiroulis est majoré de 15 % à l’avant et de 75 % à l’arrière. L’amortissement avoue cependant ses limites sur routes bosselées, où l’auto rebondit plus qu’elle ne filtre.
Brutale
Pour en revenir au comportement, celui-ci est également conditionné par les semi-slicks à gomme tendre Pirelli PZero Corsa dont le grip est phénoménal. Revers de la médaille, les réactions sont brutales lorsque l’on outrepasse les limites, et l’autobloquant mécanique costaud accentue le phénomène. Ce tempérament revêche fait tout le charme de l’engin, qui sait tout de même se montrer docile en conduite coulée.
Si le châssis est bluffant, la poussée n’est pas aussi franche qu’attendue (similaire à celle de la DBS), et les performances sont relativement décevantes, avec un 1 000 m D.A. en 22’’5 (une 911 GT3 parcourt la même distance en 21’’2) et une Vmax de 305 km/h. En cause notamment un poids conséquent de 1 680 kg (seulement 15 kg de moins que la DBS qui est 34 cm plus longue). On aurait souhaité qu’Aston aille jusqu’au bout du délire en faisait subir un allégement drastique à sa GT, mais l’habitacle est toujours aussi cosy. Seule une cinquantaine de kilos a été grappillée grâce aux freins carbone-céramique très efficaces et endurants (– 12,5 kg), aux jantes forgées (– 5 kg), aux baquets en carbone optionnels (– 17 kg) et aux passages de roues arrière allégés. Autres sujets de (légère) frustration, le manque de rage de la mécanique, qui ne déclenche pas le très grand frisson que l’on pourrait imaginer, et la commande de boîte perfectible. Malgré ces petits désagréments, la V12 Vantage est sans doute l’une des Aston les plus sportives et les plus abouties. Un vrai collector.