De prime abord, Woking semble avoir limité la prise de risque avec la remplaçante de la P1. Le dessin se veut percutant sans révolutionner le style de la gamme actuelle. La découpe du museau aplani, des ailes ou de l’arrière n’a qu’un objectif : l’aéro et le refroidissement. Pour la première fois, l’aileron actif se déploie vers l’arrière sur 30 cm pour créer un effet « longtail » diminuant la traînée à haute vitesse. À contrario, il se redresse pour privilégier l’appui qui grimperait à 1000 kg. Même la Senna est battue (800 kg) ! Comme toute McLaren, la W1 réserve un accueil spectaculaire mais se distingue du reste de la gamme par ses portes papillon (et non en élytre) dont une partie sert à caler latéralement les jambes des occupants. Contrairement à la mythique F1, ils ne peuvent être que deux et prennent place au sein de la coque carbone sur des sièges fixes. Les clients fidèles ne seront pas dépaysés et retrouveront des commandes par satellite, un écran en guise de console et un volant épuré… Oui, mais il dispose désormais de deux boutons colorés pour gérer l’hybridation. Allons-plutôt voir ce qui se passe à l’arrière !
9200 tr/mn !
Lors de sa présentation en fin d’année dernière, la W1 a laissé un sentiment de déjà-vu au niveau de l’hybridation avec l’association d’un V8 biturbo à un électromoteur. Sauf qu’en sortant la loupe, tout est inédit ! Le V8 développé par McLaren et produit chez Ricardo garde certes une ouverture à 90°, une lubrification à carter sec et un vilebrequin plat mais n’a plus les mêmes cotes ni le même agencement. La cylindrée régresse légèrement par rapport au bloc M840T de la 750S. L’alésage des cylindres passe de 93 à 92 mm alors que la course augmente de 73,5 à 75 mm. Les turbos à double entrée (maxi 1,5 bar) grossissent et se positionnent à l’extérieur du V, le plus bas possible pour abaisser le centre de gravité. McLaren a refusé d’opter pour des turbos électriques en raison de leur masse plus élevée. La plus grosse évolution vient de l’alimentation combinant une injection dans les tubulures à celle au sein des cylindres. L’objectif ? Le rendement qui atteint un record de 233 ch/l rien que pour le V8 de 923 ch et le respect des normes de pollution. L’injection directe fonctionne sous une pression pouvant atteindre 350 bars et permet de porter le rapport volumétrique de 8,7 à 9,3. L’injection classique vient en renfort à pleine charge et pour les hauts régimes.
Il faut dire que le rupteur est désormais rehaussé de 8500 à 9200 tr/mn ! Comme la Ferrari F80, au hasard… Rappelons qu’une Lamborghini Temerario serait capable d’atteindre les 10 000 tr/mn malgré sa suralimentation. McLaren a bien évidemment rigidifié et allégé l’équipage mobile pour arriver à de tels régimes de rotation. Il évoque également un travail méticuleux sur l’acoustique pour réduire les bruits parasites : distribution, pompe à injection… Ces éléments ont été repoussés le plus loin possible de la paroi de séparation avec l’habitacle, donc sur l’arrière du moteur. Il soigne également la sonorité en diminuant les résonances et en jouant sur la taille des collecteurs d’admission et d’échappement. Bref, les tympans devraient apprécier ce 4 litres que l’on retrouvera sur la future gamme. Au final, il gagne 10 kg par rapport au bloc de la 750S et des régimes de rotation en hausse de 8 %. Cela peut vous paraître dérisoire, mais cela relève d’un beau jus de crâne d’ingénieurs à ce niveau.
1399 kg à sec
McLaren n’a pas concentré ses efforts que sur le V8 et son homologation. Il parvient à économiser du poids en faisant appel à une nouvelle boîte à double embrayage et 8 rapports intégrant l’électromoteur. Cela permet de se passer de démarreur, d’alternateur et d’une pignonnerie pour la marche arrière. Le moteur synchrone à aimants permanents pesant 15 kg (sans l’électronique de puissance + 5 kg) se situe sur la gauche de la boîte (voir diaporama) et est lié à l’arbre des rapports pairs via un engrenage. Il ajoute 347 ch, 440 ch et peut grimper à 24 000 tr/mn ! Il est alimenté par une petite batterie de 1,384 kWh composée de 12 modules de forme cylindrique dont le refroidissement s’inspire de la compétition (fluide diélectrique). Elle prend place dans une structure en carbone positionnée transversalement dans le dos des occupants, au niveau du plancher. L’ensemble pèserait seulement 53 kg, ce qui représenterait un régime de 40 % par rapport à la P1.
L’autonomie 100 % électrique s’élève à seulement quelques kilomètres mais n’ayez crainte, la batterie se recharge très rapidement en roulant. L’autre grosse nouveauté réside en la greffe d’un différentiel actif qui permet une totale liberté en termes de verrouillage. Il a du pain sur la planche puisque la W1 reste une pure propulsion dont la masse ne dépasserait pas les 1500 kg avec les fluides ! Dès le début du projet en septembre 2020, Woking a banni la transmission intégrale pour éviter d’ajouter du poids sur l’avant. Nous avons également pu en savoir plus sur les modes de conduite. Outre un E-Mode permettant de couper le V8 sur courte distance, il existe un Comfort privilégiant le thermique et faisant appel à l’électrique seulement en cas de forte sollicitation. Le Sport ajoute la fée électricité et rend la boîte plus engageante. Quant au Race, il comprend le mode Sprint libérant toute la force électrique et la capacité de la batterie pour une courte distance (exemple un tour sur circuit), ainsi que le Grand-Prix offrant des performances plus constantes. Quel que soit le mode, un Boost reste disponible au volant… Dès fois que vous ayez du mal à doubler !
On en plaisante mais la principale interrogation que soulève cette W1 concerne la maîtrise d’un tel couple et d’une telle puissance… Pauvre pneus arrière ! Quand on demande à McLaren pourquoi une telle surenchère, il rétorque que la demande émane des clients. Les 399 chanceux ont-ils conscience qu’ils vont se satelliser ?