Comparatif

UN ESSAI SIGNÉ MOTORSPORT

François Delecour au volant du trio GR Yaris / Escort RS Cosworth / Lancer Evo 9

Après avoir mis le feu à Magny-Cours et à la campagne nivernaise, la sportive 2020 "Motorsport" rejoint son terrain favori : les spéciales. Un certain François Delecour l’attend de pied ferme avec deux autres stars du rallye qui ont autant marqué sa carrière que leur époque : l’Escort RS Cosworth et la Lancer Evo IX. Top départ !
SOMMAIRE

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La GR Yaris dévale la descente de la route des Arcs tambour battant, avant d’entamer un gros freinage. Son pilote tombe trois rapports en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire avec les petits coups de gaz qui vont bien, place le nez d’un coup de volant précis et tire le câble pour la faire pivoter et remettre les roues droites le plus rapidement possible dans cette sortie d’épingle. Installées au bord de la route, l’antenne savoyarde de la team Motorsport et sa horde de montagnards sont aux anges. En pleine organisation du Motorsportive Day, Nicolas Richel ne regrette pas de s’être libéré le temps d’une petite heure. L’ami Seb Poisson, qui déniche les meilleurs coins avec plus de talent qu’un chien truffier aguerri, a la banane, alors que Sylvain et Christophe n’en manquent pas une miette derrière leurs objectifs. Quant à Vincent et Mathieu, ils se régalent. Venus prêter leurs Lancer Evo IX et Escort RS Cosworth pour la bonne cause, ces deux locaux entièrement acquis à la cause du rallye dégustent en connaisseurs ce moment privilégié.
Le reste de l’assemblée aussi. Au volant ou lors de chaque pause entrecoupée d’anecdotes croustillantes, François Delecour joue le marchand de bonheur, devant un parterre de passionnés qui apprécie cette savoureuse tranche de vie à sa juste valeur.

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De grandes espérances

Inutile de vous dire que celui que ses fans surnomment “freine tard” ne s’est pas fait prier longtemps pour inviter le spectacle à bord de ces trois intégrales taillées pour le rallye. Surtout que le garçon est du genre à se réveiller la nuit pour une bonne tranche de rigolade derrière le volant : « Je me suis récemment refait une Subaru WRX génération 2001 que j’ai montée en pneus clous pour les escapades nocturnes sur les routes enneigées de l’arrière-pays ». Un rallyman de ce calibre qui aime ça d’une manière aussi spontanée ne peut que faire rêver.
Il est donc logique que l’ami François soit aussi curieux qu’excité de découvrir notre Sportive 2020 : « Sébastien Ogier s’en est fait offrir une par son employeur et Sébastien Loeb a dû recevoir la sienne. C’est vraiment sympa sur le papier, surtout que cela fait longtemps qu’une telle auto n’est pas sortie ». En effet. Depuis la disparition de la Lancer Evo IX à la toute fin des années 2000, les amateurs de sportives à transmission intégrale taillées sur mesure pour des spéciales attendent désespérément une relève aussi charismatique. En cochant toutes les cases sur le papier, la GR Yaris leur donne des raisons d’espérer.
Les 70 exemplaires alloués à la France se sont écoulés en quelques semaines avant que Toyota ne ferme les commandes fin janvier. Une seconde fournée est heureusement arrivée 2022, même si les candidats inscrits sur la (très) longue liste d’attente n’auront pas été livrés. Dieu sait pourtant que cette Nippone friponne est une miraculée. Initialement destinée à servir de base à la version course de 2021 qui n’est jamais sortie pour cause de nouvelle réglementation hybride dès 2022, sa version routière aurait pu rester lettre morte, avant que Toyota ne se décide à la produire en (moyenne) série grâce à ses crédits CO2 favorables. Les sages hybrides maison qui sauvent une des sportives les plus marquantes de l’année 2020, c’est plutôt une belle histoire, mais je m’égare, alors à toi de jouer François !

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Top départ

À peine le temps de s’attacher sur la dernière place disponible que la petite Nippone démarre en trombe. Tant décriée par certains, la position de conduite dominante ne gêne pas un François Delecour tout de suite dans le feu de l’action : « C’est indispensable d’être installé haut à bord d’une voiture de rallye, afin d’avoir un champ de vision le plus dégagé possible pour voir loin et déceler rapidement les pièges de la route. Sur la Focus WRC sortie en 2003, le directeur technique Christian Loriaux avait abaissé le baquet de gauche au maximum. Une bonne idée pour le centre de gravité, mais une catastrophe pour piloter. Sur toutes mes autos de course, j’aime avoir le siège assez relevé ».
Quelques virages plus loin il se fend d’un : « C’est une mobylette ! ». Autrement dit, c’est agile précis, facile à prendre en main, et c’est un compliment. Le petit trois cylindres turbo de 261 ch en prend davantage pour son grade : « Ce n’est pas un foudre de guerre et le creux sous 3 000 tr/mn est vraiment marqué ». Cette impression se confirme en passager, même si le rodage non terminé et le lest de quatre personnes n’arrangent rien. Depuis le siège arrière, le spectacle offert par Maître Delecour se déguste pourtant comme du caviar. Ses placements chirurgicaux, ses talon-pointe éclairs et l’économie de gestes rappellent qu’un vice-champion du monde des rallyes n’est pas fait du même bois que les autres. Sa dextérité à tricoter du petit levier en cuir et à remettre la première avec une infinie douceur en sortie d’épingle rend admiratif et rappelle qu’une bonne vieille boîte manuelle valorise les vrais gestes de pilotage.

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Vu que notre pilote est aussi puriste qu’authentique, cela tombe plutôt bien : « Les boîtes robotisées me donnent l’impression de jouer à la PlayStation de mes fils. Sur la Yaris les commandes réussies participent au plaisir. Les rapports verrouillent bien, l’étagement est court et il n’y a rien à redire sur le feeling de la direction et du freinage, qui profite d’un pédalier plutôt bien adapté à la pratique du talon pointe. En plus, il y a un vrai frein à main efficace. C’est indispensable sur une auto de rallye, mais vu la généralisation des systèmes électriques sur la majorité des sportives actuelles, on pouvait s’attendre à tout ». La langue de bois étant absente du Larousse Delecour, voyez-y la marque d’un compliment sincère. François loue la motricité et regrette une petite pointe de sous-virage et que l’amortissement, bien qu’efficace, soit un poil trop souple à son goût lors de ce premier contact.

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Souvenirs, souvenirs

S’installer dans un baquet velours et empoigner le volant trois branches à l’airbag proéminent de l’Escort RS Cosworth de Mathieu permet de mesurer l’évolution de ces sportives typées rallye sur pratiquement trente ans. C’est aussi et surtout pour notre pilote l’occasion de retrouver la version routière d’une auto de course qui lui permit de décrocher le titre de vice-champion du monde en 1993 et d’ouvrir l’armoire aux souvenirs : « J’ai reçu la toute première version routière livrée en France. Elle venait juste de faire l’ouverture du GP de Magny-Cours F1 1992. Je l’ai récupérée dans la foulée et elle était de la même couleur, avec cet anachronique aileron pelle à tarte que l’on reconnaissait de loin. J’avais dit à l’équipe que j’aimais bien le bleu et ils m’ont fait un mulet bleu ciel pour les reconnaissances du Rallye Monte-Carlo. L’humour anglais sans doute ! ». C’est alors le temps des 400 coups dans un contexte moins liberticide : « Elle marchait suffisamment fort pour descendre dans le Sud à 240 km/h, mais on cassait souvent les turbos, et les boîtes étaient fragiles. Je vais donc y aller gentiment cette fois-ci ! ».
Sortie le 29 février 1996, celle de Mathieu est une des toutes dernières phase 2. Elle reçoit donc un petit turbo Garrett T25 plus réactif que le précédent T35. Enfin, façon de parler, comme s’en amuse notre pilote : « Il doit y avoir 4 secondes de temps de réponse par rapport aux turbos d’aujourd’hui qui soufflent immédiatement. En revanche, une fois que le boost est là, il y a du moteur ! La commande de boîte était déjà lente à l’époque et cela ne s’est évidemment pas arrangé ». Il retrouve un châssis mal suspendu en termes d’absorption des chocs, mais encore dans le coup : « Mis à part un amortissement raide qui filtre beaucoup moins bien que celui d’une sportive moderne qui dispose de plus de débattement, son équilibre est plus neutre que celui de ses descendantes et je ne suis jamais en attente sur le train avant ». L’Escort RS Cosworth conserve de beaux restes, même si elle ne peut évidemment suivre le rythme imprimé par la benjamine.

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Délices orientaux

La Lancer Evo IX de Vincent n’attend plus que son pilote. Derrière le fameux “cent fois trop tard” du RAC 2002 passé à la postérité, la marque aux trois diamants n’a pas laissé que de bons souvenirs à notre champion pour sa fin de carrière professionnelle en WRC : un gros crash en Australie 2002 avec la plus forte décélération jamais enregistré en rallye, une monture aussi rétive que dépassée, et de nombreux espoirs déçus. À côté de cela, les versions routières baptisées Lancer Evo fixent de nouvelles références depuis la fin des années 90, même si l’importation officielle en France n’arrive qu’en 2004 avec l’Evo VIII et se termine en apothéose avec le neuvième opus… Mieux vaut oublier l’édulcorée Evo X !
François se souvient comme si c’était hier de cette prestigieuse lignée qui a enfanté les meilleures sportives de rallye : « J’ai eu une Evo IX, mais je me suis tellement amusé avec, à force d’emmener des copains passionnés, que j’ai fini par vite la fatiguer, avant de la vendre ». Avant d’ajouter, l’air malicieux : « Lors de l’époque Peugeot en Mondial avec les 206, nous avions des Lancer Evo qui servaient de mulets pour les reconnaissances. Priscille de Bellois qui était alors mon ouvreuse arrivait à l’assistance pour me rapporter les notes avant de ranger la voiture discrètement derrière les grands camions. Peugeot qui n’avait alors pas de modèle à transmission intégrale dans la gamme avait acheté une dizaine de Mitsubishi, mais nous étions obligés de les cacher car ce n’était pas corporate. C’était encore plus cocasse chez Ford où nous reconnaissions avec des Volvo. De véritables tanks qui servent encore aujourd’hui et ont depuis été largement amortis par l’ami Malcolm Wilson ! ».

Au volant ou lors de chaque pause entrecoupée d’anecdotes croustillantes, François Delecour joue le marchand de bonheur

Achetée il y a trois ans à Chambéry, l’Evo IX de Vincent est quelque peu optimisée : prépa moteur GL Racing, disques de freins sur bol alu et plaquettes Ferodo, embrayage renforcé, et j’en passe. Installé dans le siège de droite, son heureux propriétaire boit du petit-lait aux côtés d’un pilote qui l’a fait rêver. À leur retour, le regard bleu perçant du préposé au baquet de gauche qui brille comme celui d’un môme devant le sapin de Noël en dit long : « C’est vraiment bien ! C’est une arme redoutable qui a super bien vieilli. Le train avant est un scalpel et la voiture vire davantage à plat et se montre bien plus réactive dans les changements de cap que la Yaris. Je ne me souvenais plus que c’était aussi génial ». Certes, les 57 mkg de couple du 2 litres turbo porté ici à 414 ch et son tempérament explosif jusqu’à 7 600 tr/mn participent à dessiner de jolies virgules en sortie d’épingle, mais les capacités de danseuse étoile de la Mitsubishi tiennent dans sa diabolique transmission intégrale à ponts pilotés. L’efficacité des systèmes ACD qui gèrent la répartition interponts selon trois programmes et du S-AYC qui répartit le couple entre les roues arrière gauche et droite tient de la sorcellerie.

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Fin de spéciale

Un dernier complément d’enquête à bord de la Yaris permet aussi de faire d’autres heureux sur le siège de droite ou la banquette arrière. François aime autant piloter que faire plaisir, pour le plus grand bonheur de Nicolas Richel (qui a reçu la sienne au printemps), de Mats, de son grand frère Théo et des autres veinards qui s’en souviendront longtemps. Au final, la Sportive 2020 reste la meilleure petite sportive actuelle du marché pour s’amuser sur les départementales, mais pas la meilleure des sportives typées rallye de l’histoire : « C’est une super auto, mais j’attendais un peu plus de fermeté et un typage châssis plus radical. La suspension est bonne, le confort excellent, mais les mouvements de caisse ne la rendent pas aussi tranchante. Avec la Mitsu Evo, j’ai retrouvé une efficacité incroyable et un avant autrement plus précis ». Alors oui, l’alignement incroyablement favorable des planètes pour qu’un constructeur ait pu enfanter une licorne comme la GR Yaris dans un contexte difficile a peut-être rendu l’histoire trop belle et participé à l’emballement général sur ses capacités surnaturelles. Mais il faut apprécier la démarche de Toyota à sa juste valeur. Dans l’histoire, le plus difficile reste de trouver les deux autres dévoreuses de spéciales. Un vrai parcours du combattant, surtout que Vincent est bien décidé à garder son auto !

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