Ce titre provocateur s’appuie sur le nombre important d’infractions routières de conduite en alcoolémie constatées chaque jour sur le territoire national, toutes catégories socio-professionnelles confondues. Nous ne sommes, pour la plupart d’entre nous, pas à l’abri d’un impair, d’une conduite en ayant préalablement consommé quelques verres d’alcool en trop. Ce n’est pas à mon sens un tabou que d’en parler, et il me paraissait important d’aborder la conduite d’un véhicule équipé d’un éthylotest antidémarrage (EAD). Ce système installé par un professionnel agréé (location ou achat) empêche le démarrage du véhicule si le taux d’alcool enregistré dans l’air expiré dépasse le seuil autorisé. Sa mise en place est prévue dans le cadre :
- d’une conduite relative au transport de voyageurs
Depuis le 1er septembre 2015 (2016 dans les départements et territoires d’outre-mer), les autocars affectés à un transport en commun de personnes doivent être obligatoirement équipés d’un éthylotest antidémarrage (EAD).
- d’une suspension administrative décidée par l’autorité préfectorale
Dans les cas de conduite en état d’alcoolémie, et (plus rarement) de refus de vérification de l’état d’alcoolémie, le Préfet peut suspendre administrativement un permis de conduire tout en permettant la conduite d’un véhicule à la condition qu’il soit équipé d’un EAD.
Au stade de l’enquête pénale et au moment de votre audition, il n’est pas rare que les forces de l’ordre vous demandent votre avis sur la mise en place ou non d’une telle mesure qui permet ainsi de continuer à conduire, malgré la suspension.
La durée est d’un an maximum, mais je me dois d’attirer votre attention : il est de plus en plus fréquent que le Préfet prenne une décision de suspension bien plus longue. Et il n’est pas rare non plus que la décision judiciaire, intervenant par la suite, soit prise plusieurs mois après les faits reprochés, ce qui entraîne l’obligation d’installer un EAD durant une longue période et de devoir utiliser le seul véhicule équipé du dispositif sur toute cette période.
- d’une décision judiciaire
Le juge peut prévoir la conduite avec un EAD dans les cas suivants :
• délit de conduite en état alcoolique ;
• délit de conduite en état d’ivresse manifeste ;
• refus de se soumettre aux vérifications de l’état d’alcoolémie ;
• récidive de conduite sous l’emprise de l’alcool ou de stupéfiants ;
• récidive de refus de se soumettre aux contrôles d’alcoolémie ;
• homicide ou blessures involontaires par conduite en étant dans un état alcoolique.
Dans ce cas, l’obligation de conduire avec un EAD peut être de 5 ans maximum.
Une telle obligation peut être ordonnée dans le cadre d’une suspension du permis, mais elle s’applique également et obligatoirement cette fois-ci, dans l’hypothèse d’une annulation judiciaire du titre de conduite, avec interdiction de repasser son permis durant une certaine période. Dans ce cas, l’intéressé devra néanmoins repasser les épreuves du Code de la route ainsi que les examens médicaux pour pouvoir prétendre conduire à nouveau un véhicule durant la période concernée par l’interdiction de repasser son permis sans EAD.
Dans tous les cas, le non-respect d’une obligation de conduire avec un EAD peut être sanctionné de 2 ans de prison, 4 500 Ä d’amende et d’une annulation du permis pendant 3 ans maximum ou interdiction de conduire pendant 5 ans maximum ou peine de travail d’intérêt général. En cas de récidive, le véhicule utilisé peut être confisqué.
Si l’utilisation de l’EAD est faite de manière frauduleuse, avec un complice par exemple, une amende de 5e classe d’un montant maximum de 1 500 Ä est prévue pour les deux.
Bien évidemment, les frais d’installation et de fonctionnement de l’EAD sont à la charge du conducteur qui peut choisir de l’acheter ou le louer. Un EAD coûte environ 1 300 Ä ou 100 à 120 Ä par mois à la location (plus environ 450 Ä de montage et de démontage).
Pour conclure, il est intéressant de constater qu’un tel dispositif permettant la conduite d’un véhicule malgré une interdiction temporaire s’applique uniquement aux infractions liées à l’alcoolémie et qu’il n’en est rien pour les conduites sous stupéfiant, et encore moins pour les excès de vitesse entraînant une suspension des droits à conduire dont les périodes sont le plus souvent fixées à 6 mois par le Préfet.
Nous pourrions parler d’une rupture flagrante d’égalité devant la loi, mais c’est un autre débat…