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Ferrari 550 Prodrive : une légende moderne

La 550 Maranello Prodrive fut la GT la plus victorieuse du début des années 2000, et la dernière Ferrari V12 à remporter une victoire de catégorie au Mans.
SOMMAIRE

Il y a peu de mots plus évocateurs en sport automobile que « Ferrari » et « Le Mans ». Le constructeur s’y est fait un nom, en remportant la première épreuve disputée après-guerre, en 1949, et des années 50 au début des années 70, Enzo Ferrari considérait qu’il était vital que ses voitures brillent au Mans. La marque y a ensuite connu un rôle plus secondaire, avec les Daytona et BB en catégorie GT, avant de fournir dans les années 80 les moteurs pour l’équipe d’usine Lancia en Groupe C.

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Lorsque celui-ci s’est éteint au début des années 90, les GT sont revenues sur le devant de la scène, en tant que formule plus abordable, s’appuyant sur des équipes privées. Parmi les premiers concurrents on trouvait des machines de course sur base de 348, puis de F355, ainsi que des F40. Mais, alors que la nouvelle série BPR et les 24h du Mans évoluaient pour devenir le Championnat du monde GT géré par la FIA, la recette s’est rapidement dégradée : d’abord avec l’apparition de la Porsche 911 GT1, puis de la ­Mercedes-Benz CLK GT1. Cette dernière était un pur prototype de course soutenu par un budget colossal, bien au-delà de ce qu’aucune autre équipe d’usine rivale ne pouvait se permettre. Même Ferrari, qui avait commencé à développer une F50 de GT1, a jeté l’éponge et a discrètement vendu ses mulets d’essais.

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Les modifications aérodynamiques étaient profondes, mais Peter Stevens a été appelé pour s’assurer que la 550 de course ait toujours une apparence de Ferrari classique.

Ainsi, la catégorie GT1 a été supprimée en 1999 et le championnat GT s’est disputé avec des voitures de type GT2 comme catégorie principale. Pour Stéphane Ratel, le promoteur de la série (l’ancien « R » de la série BPR), et sa société SRO, la gestion d’un championnat international avec quelques Dodge Viper et 911 turbocompressées n’était pas attrayante. Il passa à l’offensive et fit valoir à la FIA que, plutôt que d’attendre que les constructeurs homologuent leurs voitures pour la course, les équipes devaient pouvoir demander un livret technique pour un véhicule en particulier, ce qui revenait à inverser la procédure traditionnelle. La FIA a accepté et, après avoir dressé une liste de voitures viables, a donné aux constructeurs 15 jours pour protester contre leur inclusion.

Mais ce que Ratel souhaitait vraiment, c’était une Ferrari en tête de la grille, et la 550 Maranello de l’époque correspondait parfaitement à l’image des grosses GT. C’est pourquoi, au début de l’année 2000, un projet de développement de la 550 en une machine de GT fut lancé par le bureau d’études turinois Italtecnica, connu sous le nom de 550 Millennio. Développée en un temps record, l’auto était équipée d’un V12 de 6 litres, affichait le poids minimal autorisé de 1 100 kg et était aussi redoutable qu’elle en avait l’air.

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Le panneau de commandes est au sommet de la modernité pour le début des années 2000.

Malheureusement, les résultats de cette saison 2000, ou plutôt l’absence de résultats, laissaient penser qu’elle était tout sauf formidable, la 550 souffrant notamment d’une fiabilité lamentable. L’un des bailleurs de fonds du projet était l’industriel français Frédéric Dor, qui engageait depuis longtemps des voitures de rallyes préparées par Prodrive, dont une Subaru Impreza WRC ex-Colin McRae en 1999. Avec un œil sur les résultats jusqu’alors médiocres de la voiture, Dor a expédié sa 550 en Angleterre, chez Prodrive, avant même qu’elle n’ait roulé, et le pronostic de George Howard-­Chappell n’était pas encourageant. Pour être franc, si la voiture devait porter le nom de la société, ils préféraient repartir de zéro. C’est là que le projet de la 550 Prodrive a réellement commencé.

Pour compliquer la tâche, les courses de voitures de sport traversaient l’une de leurs plus importantes périodes de changements, et deux grandes bases de pouvoir émergeaient de cet enchevêtrement : le championnat GT sanctionné par la FIA, mais aussi l’American Le Mans Series (ALMS) en partenariat avec l’ACO (l’Automobile Club de l’Ouest, l’organisateur des 24 heures du Mans et le promoteur des Le Mans Series européennes), ce qui signifiait que les voitures qui couraient aux États-Unis et au Mans étaient soumises à un ensemble de règles légèrement différentes selon l’endroit où elles étaient engagées. Les équipes devaient donc tester et développer des versions subtilement différentes de leurs voitures si elles voulaient être compétitives dans les deux championnats.

550 Prodrive, châssis 03

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Les deux premiers châssis construits par Prodrive ont été créés à partir de voitures de route à conduite à gauche achetées par George Howard-Chappell, alors directeur technique de Prodrive (et plus tard directeur de l’équipe), chez un concessionnaire londonien. La voiture que vous voyez ici, le châssis 03, est encore plus spéciale. Détenue au moment du reportage en copropriété par Max Girardo, de Girardo & Co, et James Cottingham, de DK Engineering, elle a commencé sa vie comme la voiture de route de Dor, celle-là même avec laquelle il s’était rendu à l’usine Ferrari pour une réunion finalement infructueuse avec Jean Todt dans le but d’essayer de convaincre Ferrari de fabriquer une 550 de course d’usine. Dor l’a ensuite fournie à Prodrive lorsqu’ils ont voulu construire un troisième châssis, et la société a finalement assemblé douze voitures : dix de course et deux de test et de développement.

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Le support en aluminium de la direction, qui doit rentrer bien plus dans l’habitacle que sur la voiture de route

Le plus grand fait de gloire du châssis 03 sont ses cinq participations au Mans (2002, 2003, 2004, 2005 et 2006, le plus grand nombre d’apparitions pour le même châssis Ferrari aux 24h). La plus mémorable étant l’édition 2004, lorsque Colin McRae a ­rejoint Rickard Rydell et Darren Turner, le trio terminant troisième de sa catégorie. La voiture est récemment retournée sur la piste et elle est également la vedette d’un nouveau livre sur les 550 Maranello GT Prodrive (disponible sur girardo.com), dans lequel une bonne partie des informations de cet article a été glanée.

Carrosserie, structure et aéro

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Montés à l’arrière, la boîte et le différentiel d’une pièce sont rejoints dans le « coffre » par bien d’autres accessoires, dont l’alternateur, la batterie et le système de lubrification à carter sec, le tout aidant à la répartition des masses.

Si le règlement GT de l’époque autorisait des modifications substantielles de la voiture donneuse, la base restait très largement inchangée. Dans le cas de la 550, c’était plutôt une bonne nouvelle. Celle-ci disposait déjà d’un moteur de grande cylindrée de conception sophistiquée et, surtout, sa boîte de vitesses était transaxle (montée à l’arrière), et non à l’extrémité du moteur, ce qui était très avantageux pour la répartition des masses et la motricité. Sa suspension à triangles superposés était idéale pour la compétition et sa carrosserie présentait une faible résistance à l’air, alors que les grands porte-à-faux avant et arrière offraient beaucoup d’espace pour faire fonctionner les appendices aérodynamiques supplémentaires.

« La Mondeo de BTCC que nous avions construite pour Ford et qui a remporté le titre 2000 était une magnifique voiture de course fabriquée à partir d’un modèle de route. C’était le niveau recherché », déclare aujourd’hui Howard-Chappell, expliquant pourquoi la machine d’Italtecnica n’aurait jamais été assez bonne pour eux. « Du point de vue de l’ingénierie et de la conception, le projet Ford BTCC nous a permis de réaliser une voiture telle que la 550 ».

Pourtant, comme il le fait remarquer, ce n’était pas une nouvelle McLaren F1, et elle n’avait pas non plus les avantages inhérents d’une Saleen S7R, l’une de ses rivales à moteur central, pratiquement conçue pour le circuit.

Dans ce contexte, il était vital d’équilibrer la répartition des masses et d’abaisser au maximum le centre de gravité de la 550. Le moteur a été largement allégé (via ses composants internes et en supprimant l’admission variable, pesant 20 kg), tandis qu’un carter sec a permis de le positionner beaucoup plus bas dans la voiture. Le V12 a ensuite été reculé autant que possible vers la cloison, au point de devoir couper les couvre-culasses et qu’une nouvelle crémaillère de direction doive être placée entre les courroies de distribution et le bloc-moteur. La section centrale de la monocoque d’acier d’origine a été largement renforcée par un important arceau de sécurité, qui a non seulement assuré la protection requise en cas de collision mais a également conféré à la voiture la majeure partie de sa rigidité.

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En raison des délais serrés, il n’y a pas eu d’essais en soufflerie de modèles réduits. Un programme limité à échelle réelle a été mené au MIRA pour valider la conception des ailes arrière et la forme générale, mais l’aérodynamique de la lame avant et des soubassements ne pouvait être développée que sur la piste. C’était néanmoins une époque où les équipes pouvaient encore développer leurs voitures comme elles le souhaitaient, et ­Prodrive a fait évoluer le package aérodynamique de la 550, comme de nombreux autres détails de la voiture. Sur chaque course, régler l’angle de la lame avant ainsi que la hauteur de la voiture et l’efficacité aérodynamique des soubassements était crucial pour obtenir les performances globales optimales.

Dor n’était pourtant toujours pas satisfait. Il voulait que sa Ferrari de course soit belle, comme l’étaient les Ferrari d’usine. David ­Richards, le patron de Prodrive, a donc demandé à Peter Stevens de peaufiner l’ensemble. « Je travaillais beaucoup pour Prodrive et David m’a demandé de jeter un coup d’œil, se souvient Peter. J’ai pensé qu’il était important qu’elle ressemble à une Ferrari. C’est une grosse voiture, alors je ne voulais pas qu’elle paraisse encore plus grosse, et je voulais qu’elle soit voluptueuse. Nous avons fait un modèle en argile, et avons pris grand soin des prises d’air pour qu’elles semblent correctes ».

Moteur et transmission

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En 2002, le moteur atteignait 6,0 litres et développait plus de 600 ch.

Les règles du GT stipulaient que le bloc et la fonderie de la ­culasse devaient rester les mêmes que sur la voiture de route et qu’une bride d’admission devait limiter la puissance au chiffre espéré de 600 ch. L’équipe d’ingénieurs de Prodrive a estimé que la conception et la qualité des composants du moteur de la 550 étaient extrêmement élevées, au point de conserver, initialement, le vilebrequin en acier et les bielles en titane de la Maranello. Afin de neutraliser autant que possible les effets de la bride, la cylindrée a été portée à 5 853 cm3 (contre 5 474 cm3 pour la voiture de route), la culasse a fait l’objet de beaucoup d’attention et la distribution a été entièrement revue. Pour compliquer encore les choses, les règles de la FIA obligeaient de conserver pour celle-ci les mêmes matériaux que sur la voiture de route, alors que les règles de l’ACO/ALMS autorisaient le titane.

En spécifications FIA GT, la voiture a d’abord couru avec une bride de 32,1 mm, dont le diamètre a été rapidement été réduit à 31,6 mm lors de la course suivante, puis à 31,1 mm lorsque la voiture s’est montrée dominante. Après cela, la FIA a insisté pour que la boîte à air soit redessinée, même si elle n’avait pas été jugée illégale. L’ACO, quant à elle, n’y voyait aucun problème.

Pour les 24h du Mans 2002, la cylindrée du V12 a été portée à 5 983 cm3, grâce à un alésage de 92 mm (plus de nombreuses autres améliorations). Ce moteur développait au moins 600 ch et 750 Nm de couple.

Le dernier changement de spécifications est intervenu bien plus tard, avec un moteur « EVO » connu sous le nom de « moteur économique ». Celui-ci fonctionnait avec du carburant normal et utilisait des culasses standard et une boîte à air plus simple, le tout dans le but de réduire les coûts et d’augmenter le kilométrage. C’est l’un de ces moteurs qui se trouve aujourd’hui sur 03, ce qui explique l’absence de la superbe boîte à air en carbone et des papillons d’accélérateurs individuels du moteur d’origine.

Pour l’époque, le calculateur Pi Research, l’enregistreur des données et l’affichage électronique de la 550 étaient à la pointe de la technologie mais, tout comme son système de contrôle de la motricité, ceux-ci sont désormais rudimentaires par rapport à la sophistication de l’électronique moderne. La boîte de vitesses séquentielle était dotée d’une fonction de changement de rapport activée par un capteur optique situé à l’arrière du levier.

Suspensions, pneus et freins

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Les différentes séries demandaient des modifications : les freins à disques étaient en acier en FIA-GT, mais l’ACO autorisait le carbone-céramique.

Les 550 Prodrive utilisaient des amortisseurs de course Koni entièrement réglables. Les premières voitures avaient une direction non assistée, mais l’assistance électrique a été adoptée plus tard. La suspension à triangles superposés de la 550 était un bon point de départ : « Avec le repositionnement autorisé par la ­réglementation, nous avons obtenu quelque chose d’assez ­décent », explique Howard-Chappell.

L’équipe a commencé avec des Dunlop, mais après quelques victoires en course, elle est passée aux Michelin et a continué de rouler avec. Les disques en acier étaient utilisés dans la série FIA GT, alors que l’ACO autorisait les freins en carbone.

Conduire la 550M

Darren Turner pilotait la Ferrari 360 de l’équipe britannique ­Veloqx lorsqu’il a pris le volant de la 550 de Prodrive à Sebring, en 2003. Il ne le savait pas encore, mais ce fut le début d’une ­relation qui a duré plus de 18 ans. « J’avais passé deux ans en DTM, se souvient Turner, j’étais donc habitué aux grandes puissances. La 550 avait l’air d’une bête, mais elle était très facile à piloter. Après dix tours, j’étais déjà dans le rythme des pilotes habituels. Ces courses à Sebring et à Miami en 2003 m’ont permis d’être là où je suis aujourd’hui.

À conduire, c’était plus « tourner et plein gaz » que les GTE ­actuelles. Il y avait beaucoup de puissance, beaucoup d’appui et il fallait plus s’impliquer qu’aujourd’hui. La boîte séquentielle demandait un talon-pointe et il fallait débrayer au rétrogradage sur le mouillé. À conduire, elle était très gratifiante et on pouvait lui faire confiance. C’était un plaisir.

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Faire entrer de l’air frais dans l’habitacle était une tâche difficile.

Il faisait très chaud à l’intérieur, surtout sous les climats chauds. Nous utilisions des vestes de refroidissement, avec un grand réservoir de glace à côté de nous. Il y avait un contrôle de motricité à l’époque, mais on ne l’utilisait pas en qualifications : c’était rudimentaire, et on s’en servait plutôt pour économiser les pneus en course, en minimisant les charges latérales sur les roues arrière.

Pour moi, le meilleur moment de cette époque fut de partager la voiture avec Colin au Mans, en 2004 [Turner, Rickard Rydell et ­Colin McRae ont terminé troisièmes de leur catégorie cette ­année-là]. Il était tellement décontracté, à l’écoute et il se fondait totalement dans l’équipe.

Contrairement à aujourd’hui, nous séjournions dans un vieux château, près du circuit, et je me souviens avoir marché jusqu’à la piscine et avoir pensé à quel point c’était cool ! C’est un excellent souvenir.»

Historique en compétition

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Cette voiture a participé au Mans tous les ans de 2002 à 2006, et les autocollants des vérifications le prouvent.

2001, la première saison, fut une année de développement pour les 550 Prodrive, avec trois manches du championnat FIA GT et une manche en ALMS. L’année suivante, une seule 550 Prodrive a participé au Mans, mais bien qu’elle ait abandonné au 175e tour, elle s’est qualifiée en pole position et a réalisé le meilleur tour en course (un avertissement clair aux Corvette et Viper dominantes dans la catégorie). Le championnat FIA GT fut disputé par la BMS Scuderia Italia et les équipes d’usine Care Racing, BMS se classant quatrième au classement général, tandis que trois courses aux États-Unis lui ont permis de se classer cinquième au général en ALMS.

Tout s’est vraiment mis en place en 2003, avec la victoire au Mans en catégorie GTS pour Peter Kox, Tomas Enge et Jamie Davies, qui ont également décroché la pole position et terminé 10e au général. La BMS Scuderia Italia a également été championne de FIA GT cette année-là, tandis que Prodrive a livré une bataille épique en ALMS contre les Corvettes d’usine, manquant de peu le titre GTS.

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Sur le podium, à la 3e place de la catégorie GTS, ses pilotes : Colin McRae, Daren Turner et Rickard Rydell (de gauche à droite).

En 2004, la Saleen S7R devenait un adversaire redoutable, la 575 GTC de Ferrari était également en pleine ascension, et la ­Maserati MC12 faisait ses débuts. Cependant, une troisième place au Mans, un nouveau titre FIA GT pour l’équipe BMS et le titre de pilote pour Luca Cappellari (BMS), sont autant de preuves de la classe et de l’endurance de la 550 Prodrive. Sans oublier la victoire de la 550 de Larbre Compétition dans la première édition des Le Mans Series en Europe.

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La 550 Prodrive châssis n° 03 aux 24h du Mans 2004.

En 2005, Prodrive est passé aux Aston Martin, mais les 550 ont continué à courir aux mains de privés, avec des 4e et 5e places au Mans, respectivement pour Larbre et Cirtek Motorsport. Larbre a remporté un nouveau titre de Champion du monde des pilotes en FIA GT avec Gabriele Gardel, et une troisième place au classement général des équipes derrière les Maserati, tandis que BMS remportait les Le Mans Series. En 2006, la voiture était au crépuscule de sa carrière, mais elle restait une machine performante, toujours aussi excitante à voir évoluer.

Postscript

Avec le recul, le début des années 2000 fut une grande période des courses de voitures de sport. Il s’agissait de voitures puissantes et les courses n’étaient pas contrôlées par le jugement du Balance of Performance (BOP). Comme le dit George Howard-Chappell : « Vous homologuiez la voiture de base, mais vous pouviez changer des choses et la développer. C’était très amusant. C’était une époque où, si on n’était pas assez rapide, on rentrait à la maison pour travailler sur la voiture, au lieu de chercher à changer le BOP. Les pilotes disent souvent que 2003 a été l’une des meilleures ­années de leur carrière, et c’est vrai : c’était génial ».

Un certain nombre d’équipes ont essayé de développer des voitures de course basées sur la 550, mais même Ferrari, soutenu par N Technology, et les voitures ultérieures basées sur la 575 n’ont pas su égaler le succès et la longévité de la 550 Prodrive. C’est, sans conteste, l’une des plus grandes voitures d’endurance de tous les temps. Malheureusement, la formule allait subir le sort cyclique habituel des courses d’endurance : au début des années 2010, la catégorie GT de pointe commençait à se ­diviser et à décliner. Le règlement GTE a récemment fourni une arène ultra-compétitive, mais les jours de gloire des grandes GT/GTS nous manquent encore beaucoup.

Max Girardo : Gentleman et driver

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Copropriétaire du châssis n° 03, Max Girardo assure le retour de cette 550 Prodrive en compétition.

Propos recueillis par Yan-Alexandre Damasiewicz

À la tête de la société de vente de voitures de collection Girardo & Co., basée en Angleterre, Max Girardo s’est spécialisé dans le négoce des autos de sport les plus exceptionnelles avec un faible pour les voitures de compétition, qu’il s’agisse de monoplaces, de prototypes ou de voitures de rallyes. Et pendant son temps libre, il pilote quelques-uns de ces bolides, dont la 550 Prodrive de notre reportage dont il est l’un des deux copropriétaires. Il répond à nos questions, en français.

Comment se retrouve-t-on à acheter une 550 Prodrive ?

J’avais rencontré Frédéric Dor, l’initiateur de cette voiture, en 2000 et j’avais gardé contact avec lui. Il avait conservé dix des douze exemplaires assemblés (l’un est resté dans une équipe au Japon, l’autre chez le grand collectionneur italien Guiseppe Lucchini, le fondateur de la BMS Scuderia Itala). Il ne comptait pas les vendre, j’ai dû discuter longuement avec lui… Ça n’a pas été facile !

Jamais je n’aurais pensé avoir un jour l’opportunité de pouvoir acheter une voiture que j’ai vu courir à la télévision, au Mans. L’histoire de cette voiture m’avait marqué, je l’avais beaucoup suivie à l’époque. Et puis, j’ai une énorme passion pour les rallyes, alors avoir la voiture que Colin McRae a pilotée au Mans était un plus. La voiture la plus importante de Frédéric Doc, c’est celle qui a remporté Le Mans, mais elle est intouchable. Pour moi, la suivante était celle-ci.

Aviez-vous dès le départ en tête de courir avec ?

Ça n’intéresse pas Frédéric Dor de vendre une de ses voitures pour qu’elle se retrouve immobilisée dans une collection. Nous continuons de la faire rouler avec son aide et de ceux qui la faisaient rouler à l’époque. C’est un vrai travail d’équipe.

Y a-t-il beaucoup d’occasions pour faire rouler ce type de voitures aujourd’hui ?

En 2016, ce n’était pas le cas, mais ­en 2021, il y en a énormément ! Peter Auto organise une série de courses pour ces voitures, le Racing Endurance Legend. Il y a aussi une ­série organisée par Masters Historics Racing pour les prototypes et les GT. Cette année, nous serons également au Mans, avec une course d’une heure organisée avant les 24h, destinée aux voitures d’avant 2004. Être au Mans, avec la 550, devant tous les spectateurs, ça va être quelque chose d’indescriptible !

Le marché a-t-il évolué pour les GT de course de cette époque ?

Dans les années 2010, c’étaient des voitures qui n’avaient pas énormément d’intérêt et personne ne les regardait. Depuis, le marché a considérablement évolué et beaucoup de gens veulent rouler avec les autos de cette époque. L’une des raisons est qu’on se sent beaucoup plus en sécurité à leur volant qu’avec des voitures de course plus anciennes.

Pourquoi choisir de courir avec une GT des ­années 2000, plutôt que de s’orienter vers des courses de voitures modernes ?

Aujourd’hui pour 300 000 euros, on peut s’acheter une LMP3 et rouler en moderne. Ou acheter une LMP2 des années 2000 et courir en historique. Si j’avais 18 ans et si je voulais faire carrière, je me tournerais peut-être vers la première solution, mais pour la plupart des gens, il y a une meilleure ambiance en historique : on n’est pas seulement là pour gagner, mais aussi pour s’amuser et faire rouler de superbes voitures, sur des circuits incroyables. Et il ne faut pas oublier que quand on achète une ancienne de ce type, on est certain à 99,99 % de pouvoir la revendre sans perdre d’argent, ou d’en gagner.

Il y a une grande différence dans la conduite de ces voitures, comparée à celle des GT ­modernes ?

Avec l’ABS, le contrôle de motricité, plus d’aérodynamique, de meilleurs freins et moins de puissance, une GT moderne est d’une certaine façon plus facile, mais a contrario, pour être ­rapide il faut être en permanence à 100 % de ses capacités. Sur une voiture plus ancienne, il y a un peu plus de marge d’erreur, et il y a la satisfaction de changer les rapports avec la boîte semi-manuelle, de freiner en faisant le double débrayage… Quand on y arrive, c’est fabuleux !

Quelle organisation faut-il mettre en place pour courir avec ?

Il ne faut pas oublier qu’à l’époque elles courraient avec une équipe de vingt personnes. Il ne faut pas nécessairement un team complet, mais au moins un mécanicien. Deux, c’est mieux.

Quid de la disponibilité des pièces ?

Certaines pièces comme les pneus s’achètent normalement. Les jantes peuvent être refabriquées. Pour ce qui est spécifique, comme la carrosserie, ce n’est pas facile, mais on a la chance que Frédéric Dor ait encore énormément de pièces. Prodrive en a de même pour les Aston Martin DBR9 et on trouve aux États-Unis ce qu’il faut pour les Corvette. Il faut savoir où chercher, mais une fois qu’on est dans le milieu, on y arrive !

Quel avenir voyez-vous pour cette voiture dans votre collection ?

J’ai une passion pour cette voiture. J’aimerais la garder le plus longtemps possible et pouvoir partager cette passion. Des fois, je dois me pincer pour vérifier que je ne rêve pas !

Comment avez-vous eu l’idée de faire un livre à propos des 550 Prodrive ?

J’ai réalisé que peu de gens connaissent l’histoire de cette voiture. Beaucoup pensent que c’est Ferrari qui l’a conçue. L’histoire de ­Frédéric Dor, qui voulait gagner Le Mans avec une ­Ferrari, est très belle, très romantique. J’ai une très bonne relation avec lui, je possède l’une des voitures, et nous avons acheté d’énormes ­archives comprenant trois millions de photos du sport automobile : nous avions tout pour faire ce livre qui est une autre façon de partager notre passion avec le public. 

Plus d’informations sur le livre Ferrari 550 Maranello Prodrive sur le site girardo.com/the-550-prodrive-book

Ce sujet est paru dans Enzo n°13, un magazine que vous pouvez vous procurer sur notre site NG Presse, au format papier ou numérique.

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