Les Honda NSX, c’est comme les bus. Si vous en ratez une, il faut attendre longtemps pour la suivante. Mais l’intervalle entre deux bus est toutefois plus court que les 11 années qui ont séparé la fin de carrière de la NSX originelle de l’arrivée de la version hybride que l’on connaît aujourd’hui.
Lorsque la production de la première génération a cessé en 2005, Honda réfléchissait à une remplaçante censée débuter en 2010. Le premier signe tangible de ce projet apparaît en 2007 lorsqu’une étrange S2000 modifiée est surprise sur la boucle nord du Nürburgring. Plus longue et plus large que le cabriolet de base, ce mulet présentait des montants de pare-brise à l’inclinaison revue, un toit fixe rajouté à la hâte, quatre sorties d’échappement et des plaques britanniques qui selon le registre des immatriculations identifiaient une “Honda inconnue”.
Mais le plus intéressant sur ces documents était en fait la cylindrée du moteur annoncée à 5 000 cm3. Les rumeurs laissaient pourtant entendre jusque-là que le bloc de cette seconde génération de NSX serait plus gros encore puisqu’on parlait d’un V10 de 5,5 litres monté à l’avant et développant plus de 550 ch. De plus, il devait être accompagné d’une boîte double embrayage et d’une transmission intégrale. Sur la foi de ces caractéristiques, elle était au niveau d’une Lexus LFA mais avec plus d’adhérence et des passages de rapports plus rapides.
En 2008, la S2000 mutante est remplacée par des prototypes “à la forme” (photo ci-dessus) reprenant le style du concept car Acura Advanced Sports Car dévoilé en 2007 (ci-dessous). Habillés d’une tenue de camouflage zébrée, ils furent aperçus à maintes reprises sur le Nürburgring où ils battaient régulièrement et sans forcer le chrono record de 7’40’’ de la Nissan GT-R.
Malheureusement, alors que les prototypes V10 continuaient à limer Grüne Hölle, l’économie mondiale s’embourbait et, comme ce fut le cas pour beaucoup d’autres entreprises, Honda commença à sentir les effets de la récession lorsque ses profits fondirent de 81 %. Le patron de Honda, Takeo Fukui, pressé d’endiguer l’hémorragie choisit de stopper les projets non-essentiels. Lors de son discours de fin d’année 2008 il annonça que le projet de NSX V10 était stoppé ainsi que l’engagement en Formule Un. Dans le lot, une plateforme pour grosse berline V8 propulsion disparut également. La mort de la NSX V10 pouvait être perçue comme fâcheuse mais Takanobu Ito qui succéda à Fukui en 2009 à la tête de Honda était loin de le regretter. Plusieurs années après l’enterrement de ce projet, il déclara qu’une NSX devait être « intelligente, centrée sur le comportement dynamique », ce qui signifiait en filigrane que la précédente à moteur avant n’avait rien de tout cela. Il expliqua aussi que lors de l’annonce de l’arrêt du projet qui se produisit alors qu’il était déjà un haut responsable de la firme, la colère des ingénieurs fut telle qu’on lui expliqua sur le ton de la menace qu’il valait mieux ne pas se rendre dans les bureaux de R&D où travaillaient tous ces gens.
Mais quelques éléments de ce projet NSX V10 survécurent tout de même avec la version course développée en parallèle qui devint la HSV-010 (ci-dessus) engagée dans le championnat Super GT japonais. Il s’agissait d’une propulsion abritant un V8 3,4 litres comme l’exigeait la réglementation. Normalement, les concurrentes de ce championnat devaient être basées sur des autos produites en série mais Honda réussit à faire admettre aux autorités que la HSV dérivait d’un concept de production prêt à être industrialisé, ce qui signifiait qu’il était très proche de la NSX à moteur V10 avant qui devait être commercialisée. Pour le reste du monde, il fallut attendre jusqu’en 2016 pour pouvoir à nouveau acheter une NSX.