Des berlines ou coupés au luxe outrancier discutant avec des GT au feu rouge, Mercedes en confectionne déjà depuis des lustres. Mais en 2002, la faculté de la marque étoilée à proposer des sportives “caméléons” franchit un nouveau cap avec le SL 55 AMG. Esthétiquement, le raffinement cher à la marque reste de mise. Le kit carrosserie et les roues de 18” n’altèrent en rien la ligne pure et élégante du SL cinquième du nom. Seule partie émergée de l’iceberg de puissance qui se cache sous le capot : quatre sorties d’échappement aussi imposantes que volubiles.
Une pression sur le démarreur situé au sommet du pommeau de vitesse laisse échapper un grondement caverneux qui tranche avec la discrétion générale de l’auto. Cette sonorité aux accents américains émane d’un V8 ensorcelé par AMG. Ce bloc de 5,4 litres dérive de celui équipant déjà le coupé CL 55 (360 ch), lui-même extrapolé du bon vieux 5,0 litres 24 soupapes développant 306 canassons sous le capot des SL, CLK, E et S 500. L’archaïque distribution à trois soupapes par cylindre est conservée, mais ce manque de noblesse est largement compensé par une foule de raffinements techniques, à commencer par la greffe d’un compresseur à vis entre les deux bancs de cylindres. De quoi propulser le SL dans la catégorie des supercars.
Des accélérations de Modena
Au lancement, Mercedes annonce une puissance de 476 ch, qui passera à 500 quelques mois plus tard. Cette valeur place déjà le 55 AMG un cran au-dessus des Ferrari Modena (400 ch) et autres Porsche 911 Turbo (420 ch). Mais lorsque l’on jette un oeil au couple maxi culminant à 71 mkg, la Mercedes surclasse les meilleures, y compris la Lamborghini Murciélago (66 mkg). Bien sûr, le temps où SL signifiait “Sport Leicht” (sport léger) est bel et bien révolu. L’abondance des équipements de confort et de sécurité ainsi que le toit rigide rétractable conduisent à un poids frisant les deux tonnes !
Le rapport poids/puissance demeure néanmoins exceptionnel et le SL 55 parvient à jouer dans la même cour que la Modena en accélération. L’agrément distillé par le V8 est à la hauteur de sa fiche technique. Docile et incroyablement souple à bas régime, il devient rageur et expressif à souhait à l’approche de la zone rouge. Qui plus est, la boîte automatique plutôt réussie ne nuit que très peu au brio de la mécanique. Le comportement est tout aussi enthousiasmant. Avec un tel poids, une direction très assistée, un amortissement consensuel et l’omniprésence de béquilles électroniques, on ne peut pas parler de sport pur et dur. Cela dit, l’efficacité et l’agilité demeurent étonnantes pour un engin de deux tonnes, et cela en grande partie grâce à la suspension pilotée qui limite considérablement la prise de roulis. Le pilotage de ce monstre de puissance est déconcertant de facilité, au point d’aller sans s’en rendre compte bien au-delà de ses propres limites. L’ESP semi-déconnectable, les freins XXL et l’équilibre naturel du châssis jouent alors pleinement leur rôle. Au final, la polyvalence hors normes du SL 55 lui vaudra un succès commercial amplement mérité, en dépit d’un tarif proche de celui d’une Ferrari 360.