Enzo Ferrari n’est plus, mais le cheval se cabre toujours. Fin 1989 s’achève à Francfort la carrière de la 328 avec le lancement de la nouvelle 348. Celle-ci partage son V8 avec la Mondial T, qui a inauguré quelques mois auparavant le principe du moteur central longitudinal à boîte transversale, inspiré de la F1 (312 T championne du monde avec Lauda en 1975). Cette berlinette à empattement allongé et porte-à-faux arrière réduit se veut en rupture. Elle fait appel à une coque acier, seul le bâti arrière auxiliaire est encore constitué d’une structure dite tubulaire.
Le V8 développe 300 ch DIN dans sa version non catalysée, et la boîte comporte cinq rapports. La suspension reste conventionnelle et la direction est encore dépourvue d’assistance. Les roues de 17 pouces ont permis le montage de disques plus grands et l’ABS est signé Tèves. Pour le style, Pininfarina a surfé sur les tics de la Testarossa en reprenant les lamelles latérales et les jupes noires, les feux arrière sous grille et les courbes à bord tranchant. Deux carrosseries sont disponibles : TB (berlinette) et TS (toit amovible). L’habitabilité intérieure est en progrès, les sièges enveloppant bien le corps et le volant se réglant en hauteur, mais le pédalier est étroit pour cause de passage de roue intrusif. On retrouve les effluves du cuir et les détails magiques comme la célèbre grille de guidage de la commande de boîte. En revanche, certains plastiques n’ont pas vraiment leur place dans une auto de ce prix (650 000 F).
Difficile à maîtriser
L’ingénieur Felisa, arrivé chez Ferrari en 1987, a reconnu à demi-mot que la 348 n’avait pas fait l’objet d’une mise au point assez poussée pour un usage routier. Très pointue, elle a surpris plus d’un conducteur par ses réactions difficiles à maîtriser, alors qu’au même moment Honda sortait sa merveilleuse NSX, moins rapide, moins sexy, mais superbement équilibrée. Sans parler de son avant-gardisme (coque alu) et de son confort : direction assistée, suspension prévenante, commande de boîte ultra douce, tout le contraire d’une Ferrari on ne peut plus “virile”.
Bref, la 348 a fait quelques vagues à ses débuts avant de se racheter une conduite. La naissance du Spider a permis d’en revoir la structure et de lancer une GTB au train arrière plus docile, avant d’arriver à quelque chose de vraiment bien sur la 355. La 348 a aussi écrit le premier chapitre du Challenge Ferrari en faisant travailler les carrossiers les lendemains de course. Produite à 4 228 exemplaires, la 348 a un peu abusé de la réputation de son blason pour faire carrière à une époque où la maison Ferrari était encore très enfermée dans ses certitudes… et brillait moins en F1.