La Corvette C6 ZR1 est officiellement dévoilée en janvier 2008 au Salon de Détroit. Annoncée au départ avec 620 ch, elle en totalisera 647 au lancement pour un couple délirant de 83,5 mkg! Chevrolet n’en est pas à sa première attaque en règle des références du vieux continent, mais jamais le constructeur américain n’avait porté un coup aussi rude. Songez qu’à l’époque, la crème des supersportives européennes se compose entre autres de la F430 Scuderia (510 ch), la Gallardo Superleggera (530 ch) et la 911 GT2 (530 ch). À sa sortie, la ZR1 est ni plus ni moins la GT de série la plus puissante de la planète, donnée pour 3”6 de 0 à 100 km/h et 330 km/h en pointe. Ses chiffres sont dignes d’une supercar pour 136990 euros en France, soit le prix d’une 911 Turbo de l’époque et 70000 euros de moins qu’une Scuderia. Chevrolet a opté pour une version suralimentée du V8 6,2 litres qui anime la C6. Baptisé LS9, ce small block rustique à deux soupapes par cylindre bénéficie de la greffe d’un compresseur Eaton soufflant à 0,72 bar et travaillant de pair avec un échangeur air/eau visible sous l’inédite vitre en Lexan qui surplombe le capot bombé. L’équipage mobile est spécifique, avec des pistons et un vilebrequin forgés ainsi que des bielles en titane, tandis que la lubrification passe au carter sec. Esthétiquement, outre la vitre sur le capot, la ZR1 se démarque assez peu de la Z06 qu’elle surplombe dans la gamme Corvette. On notera simplement des extracteurs d’air différents sur les ailes ainsi qu’un kit aérodynamique plus élaboré. Nous retrouvons des ailes et passages de roues en carbone, symbole d’une architecture se voulant simple et légère.
7’19”96 au Nürburgring
Le châssis reste composé de longerons sur lesquels est greffée une structure en aluminium, le tout posé des triangles superposés associés à d’antiques ressorts à lames transversales. Chevrolet coupe l’herbe sous le pied des sceptiques qui douteraient de la capacité d’une Corvette de passer efficacement au sol 647 ch en annonçant dès 2008 un temps record de 7’26”40 au Nürburgring. C’est trois dixièmes de mieux que le temps de la Nissan GT-R réalisé deux mois plus tôt, et deux secondes plus vite qu’une Carrera GT! En 2011, la ZR1 descendra à 7’19”96 à la faveur d’une mise à jour intégrant notamment un pack baptisé PDE. Ce dernier comprend des Michelin Pilot Sport Cup développés spécifiquement ainsi qu’une boîte courte, disons plutôt moins longue, et un kit aérodynamique spécifique. Dans la vraie vie, la plus puissante des Corvette est bien le monstre que l’on imagine. On ne l’aborde pas avec la même décontraction que l’on peut avoir au volant d’une 911 ou d’une Ferrari de son temps. La ZR1 s’apprivoise, se dompte, oblige à doser très finement les gaz, notamment avec les pneus froids, et à s’impliquer corps et âme au volant pour en tirer le meilleur. Le V8 suralimenté n’offre pas l’agrément du 7,0 litres atmo de la Z06, mais son rugissement est aussi terrifiant que le châssis efficace. 40 kg plus légère qu’une 458 Italia et magnifiquement équilibrée, la Vette se révèle étonnamment sereine, saine et rapide. Sur route, les pneus extra-larges (285 à l’avant!) et les ressorts à lames peuvent donner du fil à retordre même si l’amortissement piloté (magnétique) offre un toucher de route remarquable. Sur piste, nous avons été les témoins en 2011 d’un cataclysme sur notre piste de référence lorsque la ZR1 surclassa en toute décontraction la 911 GT3 RS 4.0, la 458 Italia et la Nissan GT-R. Le record de l’Américaine ne fut battu que deux ans plus tard par la GT3 type 991, pour 4 dixièmes. L’exploit découle d’un grip latéral hors du commun, d’un sous-virage inexistant et d’un équilibre parfait. Les freins carbone/céramique, en série, remplissent également bien leur mission. Le tableau n’est pas parfait pour autant. La boîte mécanique souffre d’une commande lente et de rapports trop longs mais une fois en action, la ZR1 fait montre d’une poussée hors du infinie, comme le prouve cette vidéo tournée lors de notre essai en 2011. Dans l’habitacle, outre une finition critiquable, on peut surtout s’offusquer du maintien des sièges sport en inadéquation totale avec les vitesses de passage de l’auto. Il n’en demeure pas moins un rapport prix/prestation sans égal.