Sale temps pour les préjugés ! Si les créations de l’usine de Crew ont rarement satisfait les attentes des plus sportifs, l’année 2007 est quant à elle à marquer d’une pierre blanche. Davantage habitué à livrer des modèles somptueux, surpuissants mais rarement dynamiques, Bentley étonne en annonçant la commercialisation d’une Continental apte à faire trembler la crème des GT. Par la même occasion, la firme britannique ressort des cartons une appellation historique, liée au modèle emblématique des années 20. Bien avant que la Supersport ne soit commercialisée, la Speed s’est ainsi offert le titre de Bentley la plus puissante jamais produite en faisant passer son W12 de 560 à 610 ch !
Evidemment, ce regain de puissance se devait d’être identifiable au premier coup d’oeil. Sur ce point, Bentley a opté pour une sportivité marquée, mais en aucun cas ostentatoire. Ainsi l’Anglaise conserve sa robe élégante, ses galbes prononcés, mais pimente l’ensemble par de menues modifications. Les imposantes roues sont en 20 pouces, les sorties d’échappement profitent désormais d’un dessin évasé, tandis que l’imposante calandre arbore une teinte gris anthracite. Dans l’habitacle, ou plutôt le cocon douillet, même un spécialiste de la marque y perdrait son latin puisque la Speed pioche nombre de ses équipements dans la longue liste d’options de la Continental de base. Rare repère distinctif : les seuils de portes siglés “Speed”. Pour constater une véritable révolution, il suffit de se pencher sous le capot. Le W12, épaulé par deux turbocompresseurs Borg Warner, voit son équipage mobile revu (bielles plus légères et pistons renforcés), sa chaîne de distribution allégée et sa gestion remaniée.
Agréable à piloter
Ainsi repensé, le bloc d’origine Volkswagen gagne 50 ch et 10 mkg de couple, soit 610 ch à 6 000 tr/mn contre 560 ch à 6 100 tr/mn et 76,4 mkg à 1 750 tr/mn contre 66,3 mkg à 1 600 tr/mn. Dans les faits, cette débauche de puissance se traduit par une élasticité, un punch et des reprises incroyables. A chaque accélération, l’aiguille du tachymètre semble faire la course avec celle du comptetours malgré la masse conséquente de l’engin : 2 335 kg ! Les six rapports de la boîte automatique s’égrènent avec douceur, mais la capacité dont dispose la Speed à vous redonner une claque à plus de 250 km/h est ahurissante.
Sur un 0 à 100 km/h, l’Anglaise ne concède que deux dixièmes à une Porsche 911 Turbo (480 ch) et la laisse filer avec trois dixièmes d’avance au passage de la borne kilométrique. Si les chronos détonnent, le comportement est tout aussi déroutant. Malgré son gabarit, la Speed se joue de la physique et accepte de bonne grâce d’être malmenée. Dans les portions sinueuses, l’efficacité du châssis saute aux yeux, tout comme le travail accompli par la transmission intégrale faisant appel à un coupleur Torsen. Contre toute attente, elle enchaîne courbes et épingles avec précision sans pour autant se désunir. Dans un certain registre, la Speed est même agréable à piloter. Seul le système de freinage céramique, pourtant doté de disques avant de 420 mm et pincés par des étriers à huit pistons, avoue rapidement ses limites en utilisation intensive.