Sachant que le blason PSE enterre le badge GTi dont les dernières porteuses avaient permis de redorer le blason des sportives du Lion, Peugeot nous signifie ainsi qu’ils entrent dans une nouvelle ère de la sportivité et qu’il nous faut faire du passé table rase. Ils appellent ça la Néo-Performance…
Les affres du modernisme
Et effectivement, la technologie déployée sur la 508 PSE n’a rien d’équivalent dans l’histoire des sportives routières de la firme, ni même sur le marché actuel où la seule référence prise par les développeurs de Peugeot fut la rare Volvo S60 Polestar Engineered (405 ch et 69 100 euros)… Par contre, malgré l’aspect nouveauté, il est également évident que les concepteurs n’ont pas eu de chèque en blanc pour concevoir cette version dite sportive. En partant d’une base de 508 HYBRID 225, ils ont pioché un peu partout dans la banque d’organes PSA pour optimiser l’auto mais n’ont pas pu repenser un engin qui semble être arrivé au plan Produits assez tardivement (l’auto n’a commencé son développement qu’après la présentation du concept il y a à peine deux ans et demi). Pour élargir les voies, ils ont repris des triangles de DS7, les supports élastomère de suspensions proviennent de la 308 GTi, tout comme le système de freins (disques 380 mm sur bol alu et étriers 4 pistons) tandis que les batteries ne sont en rien optimisées pour l’exercice spécifique d’une variante sportive. Ce choix a évidemment des limites.
Par exemple, lorsque l’on demande pourquoi l’auto ne dispose pas d’un mode ESP Off, la réponse est surprenante. La législation imposerait qu’un bouton dédié permettant de le réactiver soit accessible en un clic à portée de main mais comme ce bouton n’existe pas sur la 508 HYBRID, impossible de tout modifier pour l’intégrer sur la PSE. Pour la boîte automatique 8 rapports ne disposant pas de mode Manuel, il semble là aussi que ce soit un souci de norme de consommation et d’émissions de CO2 à respecter qui ait rendu incontournable un fonctionnement automatisé. Pareil pour le fonctionnement des assistances de sécurité, actives par défaut à chaque démarrage. Là aussi impossible de modifier la stratégie de fonctionnement sauf à devoir repasser un test Euro NCap, par conséquent, chaque fois que vous coupez le contact, les aides au maintien dans la voie et les alertes actives de franchissement de ligne et de bas-côtés se réactivent. Ce qui n’est pas le cas en général sur des autos à vocation sportive !
Pour la petite histoire, étant donné que j’avais déconnecté tout ce barda sécuritaire avant de partir mais que j’ai coupé le moteur deux minutes avant de sortir du circuit, je me suis coltiné une direction épouvantable durant plus de 100 km sans comprendre pour quelle raison des retours de force intempestifs rendaient la conduite si stressante et si imprécise sur les petites routes bosselées des belles Alpes mancelles. Impossible de prendre une trajectoire sans que le volant se durcisse avant de relâcher son effort l’instant suivant. Je vous laisse imaginer mon désarroi… et celui de l’ingénieur responsable du programme 508 PSE lorsque je lui ai décrit le problème avant de nous rendre compte de la raison ! Mais comment peut-on qualifier “d’aides à la conduite” ce genre d’assistances stupides rendues obligatoire par des organismes privés tels qu’Euro NCap ? C’est plus dangereux que rassurant à mon sens. Bref, parenthèse refermée.
Néo-Performance
La 508 PSE cache donc trois moteurs (un de plus que la 225) fournissant au total un maximum de 360 ch et 520 Nm de couple. Le 4 cylindres 1,6 litre turbo fournit 200 ch à 6 000 tr/mn, le moteur électrique avant de 110 ch est situé avant la transmission automatique (contrairement à celui du prototype 308 R Hybrid), et on trouve à l’arrière un dernier moteur électrique de 113 ch, ce qui fait de la 508 PSE une traction intégrale mais sans lien mécanique entre moteur et essieu arrière, tout étant géré par électronique. Contrairement à une Cupra, une gestion du couple sur les premiers rapports cherche à privilégier la motricité, cela évite les débordements mais cela enlève aussi l’effet waouh généralement ressenti lorsqu’une aide électrique vient booster les démarrages. Et comme le bébé pèse tout de même 1 850 kg (+ 25 kg pour la SW), les 360 ch ne défrisent guère au lancement. De plus, le régime maxi ne grimpant pas au-delà de 6 200 tr/mn et la sonorité étant également quelconque, difficile de s’extasier sur ce moteur que la boîte automatique léthargique ne contribue pas à magnifier. Les palettes ne servent vraiment pas à grand-chose, l’automatisme reprend toujours le dessus en étant souvent à contre-courant. Reste que cela marche correctement, on est vite au-delà des limites de vitesse mais les engins de 360 ch que j’ai en tête semblent dans mon souvenir beaucoup plus nerveux et vigoureux. Le 0 à 100 km/h est abattu en 5’’2 et le 1 000 m DA en 24’’5, c’est nettement moins bien qu’une ancienne Audi S4 Avant de 354 ch ou qu’une BMW M340i xDrive de 374 ch. Et la linéarité des prises de vitesse n’aide pas non plus.
Peugeot l’avoue avant même que l’on s’élance : elle n’a rien à faire sur un circuit
Cinq modes de conduite sont proposés (Electric, Confort, Hybrid, 4WD et Sport) et sur une hybride, leur fonctionnement change beaucoup de choses. Pour commencer, on regrettera qu’il n’existe pas de mode “Individual” permettant de se concocter sa propre configuration. Impossible donc de marier une suspension “Confort” avec des paramètres direction, moteurs et boîte “Sport” par exemple. Précisons aussi que les performances énoncées sont accessibles dans le mode Sport et avec les batteries suffisamment chargées. Sur ce point, les ingénieurs de Peugeot Sport ont choisi une stratégie inédite en matière de gestion des batteries. En effet, il arrive souvent qu’une fois les “piles” déchargées, votre hybride ne fonctionne plus que sur la puissance du moteur thermique. Avouez que lorsqu’on a payé pour 360 ch, devoir rouler avec seulement 200 ch peut énerver. Conscients de cela, le mode Sport est conçu pour conserver suffisamment d’énergie électrique pour garantir la pleine puissance le plus longtemps possible. Cela signifie qu’à partir d’un certain seuil, le moteur thermique recharge en permanence les batteries en roulant. Résultat, après 150 km de routes parcourues à gros rythme, je n’ai jamais perdu l’apport électrique, et donc subi aucune frustration de ce côté-là. Même si la recharge est relativement rapide, ceux qui auront vidé les batteries en roulant la totalité des 42 km d’autonomie en électrique ne pourront s’en prendre qu’à eux-mêmes. Toutefois, cette stratégie de maintien de la performance a un prix : en effet, le 1,6 litre faisant double emploi, vous risquez d’être surpris par la consommation au bout du voyage. Mais que voulez-vous, ce n’est pas Peugeot qui a inventé le malus qui est en train de tuer toutes les sportives mécaniquement pertinentes. Quand la réglementation est stupide, les autos s’adaptent. Donc nous l’avons vu, le couple moteur/boîte sera loin de ravir l’amateur de conduite sportive. Par bonheur, les metteurs au point de Peugeot Sport sont toujours aussi doués. La suspension pilotée et l’équilibre de l’auto sont finement calibrés tandis que le confort est toujours présent malgré des jantes de 20 pouces à pneus taille basse. Hormis la direction un brin distante (n’oubliez pas de désactiver les assistances), les placements en courbe se font sans hésitation, elle sait se caler fermement et sereinement en appui grâce à ses Michelin PS 4S et parfois accepte de remuer légèrement la poupe sous l’effet d’un train directeur particulièrement accrocheur. Sa vivacité à l’inscription est le résultat d’un gros travail sur la géométrie et la suspension car Peugeot Sport n’agit pas sur les freins pour faire tourner ses autos, ce qui est heureux car la sensation de freinage manque de franchise et l’on se demande si l’endurance sera au rendez-vous.
Au volant
Une session prévue sur le circuit Bugatti du Mans doit m’éclairer sur le sujet. Toutefois, le fait que l’organisation ait choisi de nous octroyer seulement deux tours du circuit, qui plus est truffé de “slow zones” à 50 ou 60 km/h (quatre des neuf virages au ralenti), me fait penser que la belle 508 PSE ne tiendra pas la cadence. Finalement, c’est Peugeot qui l’avoue avant même que l’on s’élance en nous expliquant « qu’elle est plus une GT qu’une pistarde » et « qu’elle n’a rien à faire sur circuit ». Il semble en effet qu’un système de freinage de 308 GTi pesant 1 200 kg, aussi efficace soit-il, peine très vite à ralentir les 1 850 kg de la 508. Au final, ces deux demi-tours de circuit éclairent sur plusieurs points. Non, les freins ne tiennent pas. Oui, la 508 est joliment équilibrée et accepte de déhancher assez progressivement sur les freins. Oui, la calibration de l’ESP non déconnectable est réussie car elle ne coupe pas brutalement la progression. Non, le couple moteur/boîte n’est jamais dans le bon tempo en conduite sportive. Et non, elle n’enroule pas à l’accélération et reste typée traction.
Par bonheur, les metteurs au point de Peugeot Sport sont toujours aussi doués
Le surpoids est un paramètre qui peut expliquer bien des choses (ESP non déconnectable, freinage trop juste, performances faiblardes). Peugeot Sport n’ayant jamais eu à gérer une telle masse dans son histoire, on peut imaginer que, faute de budget pour développer une auto dès le départ capable de gérer l’inertie engendrée par son poids, ils n’avaient pas les moyens de faire autrement. À 67 100 euros (+ 1 300 euros SW) et dépourvue de malus, elle reste quand même une belle alternative aux BMW et Mercedes hybrides moins puissantes et moins chères mais nettement moins bien équipées. Et si une M340i xDrive à 66 850 euros plus enthousiasmante peut sembler plus intéressante, sachez qu’il faudra tout de même ajouter 3 550 euros de malus (et pas mal d’options) pour profiter d’un habitacle et d’un style aussi valorisants.