Où et quand ?
Début juillet, au Mans Classic, Bentley propose de regagner Lyon avec une Continental GTC V8 vert criard. Mieux que le train ? Ce genre de locomotive peut atteindre 318 km/h dans une ambiance on ne peut plus raffinée et high tech. En 19 secondes, elle permet accessoirement de tomber le haut et d’admirer les étoiles, tout en se faisant masser et en étant bercé par une sono stupéfiante. Largué le TGV !
Le pitch
Depuis 2019, Bentley déshabille la 3e génération de son best-seller Continental, reposant sur un châssis acier/alu renforcé pour supporter l’ablation du toit. Bilan de l’opération : + 170 kg par rapport au coupé et une balance qui agonise avec 2,3 tonnes à vide ! Évidemment, l’anglaise embarque des moteurs à la hauteur de son blason, dont le W12 biturbo de 659 ch alourdissant encore la masse d’un quintal. Elle profite de ses liens étroits avec la Porsche Panamera pour récupérer le V8 4 litres biturbo en configuration 550 ch. L’appellation Azure ne remplace pas la « GTC » et signale seulement un niveau d’équipements plus poussé.
Au premier regard
Le choc ! Le staff Bentley nous a averti, mais le vert Apple de cette GTC en met plein les mirettes. Les yeux sont rapidement attirés par le regard diamanté, contrastant avec l’immense calandre noire. L’anglaise dégage une sacrée prestance, campée sur ses jantes assombries de 22 pouces. Les formes, dans la continuité des générations précédentes, n’ont pas pris une ride. Même sans augmenter la garde au sol (via la suspension pneumatique), elle se révèle plutôt haute sur pattes pour une GT et avale nos innombrables ralentisseurs illégaux sans éraflure. Ce n’est pas tant sa longueur qui détonne dans la circulation (4,85 m), mais plutôt ses épaules (1,96 m). En quittant le circuit du Mans, elle fait un tabac auprès du public, quelle que soit la génération.
À bord, les yeux scintillent tout autant à la vue de l’aluminium bouchonné, du cuir matelassé et des tirettes de ventilation vintage. Assis haut perché, le conducteur peut ajuster les bords du siège pour être parfaitement calé. Étonnant, comme la qualité de la hi-fi Naim optionnelle (2200 W, 18 haut-parleur) remuant les sièges de ses basses ou la console rotative digne de 007 pouvant camoufler l’écran tactile. Au centre, la commande réveillant le V8 fait aussi office de molette pour choisir le mode de conduite : Comfort, Bentley, Sport ou Custom. À l’arrière, les deux passagers sont moins bien lotis et, malgré le gabarit, ont bien du mal à caler leurs jambes En plus, ils ont intérêt de voyager léger au regard du coffre digne d’une citadine (235 l).
Les chiffres (et quelques lettres)
Le chiffre le plus perturbant concerne la masse : 2 335 kg ! Mais avec un V8 biturbo de 550 ch et 770 Nm, la GTC peut surprendre nombre de sportives en bondissant de 0 à 100 km/h en 4’’1. Il faut dire qu’elle possède une transmission intégrale et un launch control grâce à sa boîte à double embrayage en provenance de la Panamera. Bentley précise que la 8e fait office d’overdrive puisque la vitesse maxi de 318 km/h est atteinte sur le 7e rapport ! Autre chiffre impressionnant, la GTC cache des disques Brembo en carbone/céramique de 420 mm à l’avant pincés par des étriers à 10 pistons.
Le truc en plus
Le raffinement. La grande classe. Les effluves de cuir. La qualité de l’ensemble des matériaux. Le soin apporté à chaque détail. Nous sommes bien dans la haute couture automobile, loin du prêt à porter du premium allemand. S’il ne fallait retenir qu’un seul élément, ce serait la console rotative (en option selon la finition) capable d’être camouflée, de retrouver la classe d’antan en dégainant trois jauges ou de céder à la modernité en exposant un écran tactile de 12,3 pouces.
Le râleur, il dit quoi ?
Je m’attendais à une palette de réglages de suspension plus large, allant vers plus de souplesse à basse vitesse en Comfort et plus de fermeté en Sport
Sur la route
Avec une telle GT, vous vous attendez à survoler la route, à être totalement coupé du monde. Même si le confort reste d’un très haut niveau, la troisième génération de Continental reconnecte à la réalité, au bénéfice du feeling sportif. À basse fréquence, elle fait ressentir les aspérités. Le mode Sport ne se raidit pas à outrance et se focalise sur le maintien de caisse. Il réveille au passage le V8, qui se défoule à 3 000 tr/mn et se permet quelques grondements, voire quelques bruits de suralimentation en décapotant. La suspension a du pain sur la planche étant donnée la masse en mouvement et s’en sort étonnamment bien, en s’appuyant à l’image de la Panamera sur des amortisseurs pilotés, des ressorts pneumatiques (à trois chambres) et des barres antiroulis actives (en réseau 48V). Résultat, il est possible de malmener la lady, jusqu’à un certain point où les lois de la physique reprennent leur droit. En gardant un niveau d’attaque intermédiaire et déjà conséquent, le cabriolet s’en sort haut la main sur les routes corsées des Monts du Lyonnais et du Beaujolais. Il suffit d’éviter de trop contraindre l’avant, puis de réaccélérer tôt voire d’en rajouter pour voir la poupe se mouvoir avec classe.
Cependant, il faut composer avec une gestion de boîte (ZF) non sportive et avec une latence de la part de la transmission en appui. L’embrayage multidisque piloté privilégie le train arrière, mais n’est pas secondé par un différentiel actif arrière, réservé à la Speed. Même en coupant les aides, l’électronique semble tout de même freiner les ardeurs comme un ersatz de différentiel agissant sur les freins. Bref, il ne faut pas demander la lune à cette Bentley, mais les freins carbone/céramique tiennent le choc. Cette GTC supporte donc de relever le rythme, à condition de ne pas la brutaliser et de garder une âme de gentleman. Elle parvient à réduire la sensation de poids et étonnera vos passagers par son allant. Non mais !
Sur la piste
Bien qu’elle soit bien armée, cette GTC n’a rien à y faire… La faute incombe à la masse élevée et aux lois de la physique. En revanche, il serait intéressant de tester un coupé Speed sur circuit, afin de profiter de son côté survireur et du différentiel piloté arrière.
Le bienheureux, il dit quoi ?
La Continental GTC porte bien son nom en élevant haut les couleurs du Grand Tourisme : confort, polyvalence, technologies, raffinement, élégance… Elle y ajoute une belle louche d’efficacité et maîtrise efficacement sa masse
Contrat ou pas contrat
Associée au V8 biturbo, la Conti’ GT cabriolet avoisine les 250 000 € et frise les 300 000 € en finition Azure. Faute de DB12 Volante et de GranTurismo Cabriolet, elle n’a pas vraiment de concurrente directe. Les Roma, SL 63, M8 Competition et 911 Turbo S naviguent dans une autre sphère, plus sportive et moins luxueuse. L’exclusivité est au rendez-vous et la GTC propose des saveurs singulières, alliant la douceur à quelques notes pimentées histoire de surprendre les occupants et quelques malotrus. Eh oui, la lady cache bien son jeu, sa masse et son potentiel dynamique.