Où et quand ?
La constructeur anglais a sorti le grand jeu en conviant les journalistes du monde entier sur la côte d’Azur, juste après avoir dévoilé la DB12 au Grand-Prix de Monaco. Pendant tout le mois juin, les essais se sont déroulés dans l’arrière-pays, sur la route Napoléon jusqu’au Verdon et Saint-André-les-Alpes. Un magnifique parcours, sous le soleil et plutôt exigeant.
Le pitch
Aston renouvelle la DB11, sortie en 2016, qui a inauguré une plateforme inédite en aluminium. Il promet plus de dynamisme, de performances et de luxe pour titiller la concurrence. Malgré l’appellation, il écarte le V12 (sans doute pour le réserver à une édition limitée) et se concentre sur le V8 biturbo d’origine AMG en le boostant à 680 ch. Le style évolue en douceur et cache une multitude d’évolutions touchant le châssis, la suspension, le moteur ou l’habitacle. Tous ces changements ont nécessité trois ans de développement et se solderait par 80 % de pièces inédites. La coque alu est par exemple renforcée pour accroître de 7 % la rigidité à la torsion. Les voies s’élargissent. La suspension active est entièrement repensée dans le but d’étendre le panel des réglages. L’électronique en profite pour faire un bond : gestion de boîte, aides à la conduite, multimédia. Et Gaydon table sur Michelin pour faire des miracles avec une lourde GT à la force herculéenne. Il décroche en retour une exclusivité mondiale : le Pilot Sport 5S, qui plus est sur mesure.
Au premier regard
Difficile de ne pas succomber à ses charmes de lady élégante et raffinée. Il faut la regarder droit dans les yeux pour constater que leur forme s’étire différemment et qu’ils encadrent une calandre agrandie et plus agressive, à l’image de l’ancienne Vanquish ou de la DBS. À l’arrière, les feux boomerang sont conservés et toujours surmontés d’un aileron actif se dressant à la verticale. Quelle classe ! Mais elle ne révolutionne pas le style Aston, elle le fait évoluer en douceur.
En ouvrant la porte, légèrement en élytre, les effluves de cuir envahissent les narines. Un plaisir qui devient rare au sein de la production. On découvre alors une planche de bord totalement remaniée, entre un tunnel suspendu et de larges écrans au centre et face au conducteur. Aston a la bonne idée de conserver des commandes analogiques, en plus de l’écran tactile qui ne convainc ni par sa réactivité, ni par son interface. Bonne nouvelle, les deux places arrière de dépannage sont conservées, mais doivent avant tout s’envisager pour des bagages. Tout en profitant du son pur de la sono B&O, le conducteur découvre la multitude de modes de conduite ajustant l’amortissement, le différentiel, l’accélérateur, la direction, les aides, la boîte et l’échappement : Wet, Individual (réglable), GT, Sport et Sport+.
Les chiffres (et quelques lettres)
La super GT hausse le ton en matière de mécanique. Sur ce point, Aston tient sa promesse en affirmant le caractère et la voix du V8. Rappelons que le 4 litres d’origine AMG délivrait 510 ch sous le capot de la DB11. Il mange donc du lion et bondit à 680 ch en revoyant les turbos, le refroidissement, l’échappement actif et le taux de compression. Vous vous en doutez, cela se ressent ! Ce V8 cumule rondeur, effet turbo marqué à 3 000 tr/mn et aisance jusqu’à 7000 tr/mn. L’échappement pétarade généreusement à l’extérieur et se retrouve mixé avec l’admission à bord, via les haut-parleurs.
Les 800 Nm de couple font craindre le pire, mais ils passent bien au sol sur le sec, grâce au travail de la suspension, des pneus Michelin et à une bonne répartition des masses obtenue en rejetant la boîte à l’arrière : 48/52 %. Cette ZF à 8 rapports se fait oublier en conduite coulée et même en attaquant, en répondant du tac au tac. Le travail électronique porte donc ses fruits, mais il n’incluait pas de launch control sur ces modèles de présérie. En démarrant autour de 2 000 tr/mn, la force déployée et les mises en vitesse impressionnent, au point que le 0 à 100 km/h annoncé en 3’’6 paraît plausible (vidéo ci-dessous)… Alors que la masse frise 1,8 tonne en ordre de marche ! La DB12 se hisserait ainsi juste au-dessus de la DB11 V12 (639 ch), mais s’inclinerait en vitesse maxi : 325 km/h contre 334 km/h.
Le truc en plus
L’élégance, sans hésiter ! Aston continue de se démarquer par sa plastique. En regardant au-delà du ramage, la DB12 a le mérite de proposer une architecture à moteur avant et boîte rejetée à l’arrière, qui devient rare au sein de la production. L’équilibre s’en ressent et surpasse celui d’une Bentley Continental GT V8. Cette génération dispose également de trois éléments inédits sur le plan dynamique : un différentiel piloté (E-Diff Bosch), des pneus Michelin PS5S dédiés et un antipatinage réglable sur 9 niveaux (non disponible durant ces essais).
Le râleur, il dit quoi ?
Où est passé le V12 ? Bien qu’elle se nomme DB12, la mécanique se cantonne au V8 et devrait évoluer à plus de 700 ch sur l’AMR. Une édition limitée à moteur V12 n’est pas à exclure, à l’image de la V12 Vantage.
Sur la route
Cette GT se permet de calmer les ardeurs d’une Continental GT, mais se fait chahuter par les Ferrari Roma ou Porsche 911 Turbo S. Elle ne révolutionne pas le swing de la famille DB, mais en propose une belle évolution en termes de rigueur et de grip. Comme son aînée, la DB12 marque par son équilibre, qui limite la sensation de masse au placement. Le comportement devient moins flou, plus homogène grâce au travail réalisé sur la suspension. Aston a rigidifié les barres antiroulis, les ressorts et les amortisseurs réglables en continu. Rassurez-vous, la spécialiste du Grand Tourisme n’oublie pas le confort, mais fait ressentir les irrégularités y compris en mode soft « GT ». Comme la Continental GT, elle amenuise sa douceur pour se connecter davantage à la chaussée et gagner en efficacité, ainsi qu’en feeling sportif. Toutefois, la suspension perturbe par son manque de constance sur les appuis. La lady accepte d’être secouée dans le sinueux, mais pivote peu et préfère la neutralité. En titillant les limites d’adhérence, le sous-virage se transforme en survirage en ajoutant du volant et du gaz. Mais gare aux reprises de grip et au dosage des watts.
Sur la piste
Aucune session circuit n’était au programme. Ce qui se comprend étant donnée la philosophie Grand Tourisme de la DB12, son gabarit et son utilisation.
Le bienheureux, il dit quoi ?
Aston Martin est sur la bonne voie, en corrigeant le comportement aléatoire et le manque de grip de la DB11.
Contrat ou pas contrat ?
La DB11 avoisinait les 200 000 €. Sa remplaçante place la barre à 230 000 € (hors malus), donc au niveau de la Continental GT V8 (550 ch). Elle surclasse son ennemie en matière de feeling sportif, d’équilibre et de sensations mécaniques. Mais elle s’incline au niveau de la suspension et ne peut lutter contre les Ferrari Roma et Porsche 911 Turbo S en dynamisme. Cela ne devrait pas décourager les amateurs d’authentiques GT et les amoureux du coup de crayon Aston.