Essai

UN ESSAI SIGNÉ EVO

Aston Martin V12 Vantage : Phase finale

le
La dernière V12 Vantage est là, avec son bloc biturbo de 700 ch, un châssis largement retravaillé et une belle réputation à conserver. Qu’est-ce qui pourrait l’empêcher d’être un hit ?
SOMMAIRE

LE PATRON DU DESIGN MAREK REICHMAN, EXPLIQUE QUE LA NOUVELLE ÈRE DES ÉLECTRIQUES VERS LAQUELLE NOUS NOUS DIRIGEONS INEXORABLEMENT « L’INSPIRE BEAUCOUP CAR CELA VA PERMETTRE DE REPARTIR D’UNE FEUILLE BLANCHE ». Et comment ça ? « Car à partir de maintenant, nous allons pouvoir positionner le moteur là où l’on veut, ce qui n’a jamais été le cas auparavant ». Tout cela pour dire que même si les engins à moteur V8 ou V12 pouvaient être formidables à regarder, au final, ils commençaient selon Marek Reichman, à tous se ressembler.

aston V12 vantage_EVO

Tout cela s’entend jusqu’à ce que vous posiez votre regard sur la dernière création de son équipe de designers. La V12 Vantage est incroyablement belle en plus d’être spectaculaire et accessoirement une propulsion à moteur avant. Même si ses proportions restent familières, il est impossible de ne pas être béat d’admiration la première fois que vous la voyez en chair et en os. La plupart des nouveaux détails en fibres de carbone virilisent sa ligne déjà agressive et lui donnent une allure simplement époustouflante. Elle est vraiment merveilleuse.

Des caractéristiques de fin d’époque

aston V12 vantage_EVO Il faut dire aussi que chaque mouvement de cette voiture est chargé d’un poids symbolique, celui de la fin d’une époque. La V12 Vantage ressemble à un baroud d’honneur pour tous ces engins à l’ancienne dotés d’un fort pouvoir de séduction. Et cet engin est capable de chiffres très impressionnants susceptibles de faire monter votre taux d’adrénaline. Pour ceux qui la découvrent, sachez que cette Vantage est équipée du même monstrueux V12 5,2 litres biturbo qui anime la DBS Superleggera, bien que dans ce cas sa puissance ait été réduite car la boîte de la DBS (et du DBX707) ne rentre pas dans le châssis de la Vantage. Elle est donc remplacée par une automatique ZF 8 rapports provenant de la Vantage F1 Edition à moteur V8 qui ne peut évidemment pas supporter autant de couple que la boîte de la DBS. Mais il reste tout de même 700 ch à 6 500 tr/mn et 753 Nm de couple à 5 000 tr/mn, soit un rapport poids/puissance de 2,56 kg/ch. Même avec l’inévitable prise de poids due aux 4 cylindres supplémentaires et les accessoires qui vont avec, c’est une valeur impressionnante.

Comment ne pas rester béat d’admiration la première fois que vous la voyez ?

Le prix de cette ultime Vantage ? Officiellement, il est fixé à près de 310 000 euros mais pas d’empressement, les 333 exemplaires sont déjà tous vendus, la plupart avec des options faisant largement grimper le prix de base. Pour faire court, elle vogue dans les eaux économiques de la Ferrari 812 Superfast.

Des performances dans la norme

aston V12 vantage_EVO Ses performances ? Immenses, évidemment. Le 0 à 100 km/h est donné pour 3’’5 et le 0-160 km/h pour moins de 7’’ tandis que la vitesse de pointe dépasse les 320 km/h. Pour être franc, cela n’a rien de vraiment impressionnant si l’on rapporte cela à son prix. C’est dans la norme mais sans plus. Mais ça n’a pas d’importance selon Aston Martin car la V12 Vantage n’a jamais cherché à établir des records de performance. Avec elle, il est plus question de sensations, de la sonorité qu’elle produit, des émotions qu’elle fait naître et ce, longtemps après en être descendu. De fait, les améliorations apportées au châssis, à la direction et au freinage semblent beaucoup plus importantes que celles concernant simplement la performance pure. Dans ces domaines, la V12 Vantage se hisse à des niveaux jamais atteints par une Aston selon ses créateurs. Pour être clair, elle est beaucoup plus rigide que n’importe quelle autre Vantage grâce à des barres de renfort avant et arrière qui, à elles seules, suffisent paraît-il à la rendre plus tranchante et plus précise que n’importe quel autre modèle avant elle. Elle est également posée sur des suspensions plus fermes, avec des ressorts 50 % plus rigides à l’avant et 40 % à l’arrière. Les amortisseurs sont adaptés, tout comme la direction qui est plus lourde.

On trouve aux quatre coins d’énormes jantes de 21 pouces peinant à cacher des disques carbone céramique eux aussi énormes. Le boss Tobias Moers qui n’avait pas encore quitté Aston Martin à l’époque ne souhaitait pas équiper de série la V12 Vantage de Michelin Cup 2 car il les trouve trop difficiles à utiliser au quotidien sur route. L’auto repose donc sur des Pilot Sport 4 S qui suggèrent que cet engin sera autre chose qu’une simple pistarde monstrueuse homologuée pour la route et ce, malgré l’affirmation martelée par le staff d’un appui aérodynamique de 204 kg à 320 km/h procuré par l’aileron (optionnel) en fibres de carbone et un splitter avant très proche du sol.

Une fois au volant …

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À bord, peu de choses la distinguent de ses congénères à moteur V8, mis à part un petit badge V12 à la base de la console centrale et surtout les sièges optionnels. L’auto est équipée de ces baquets en fibres de carbone qui permettent de gagner 8 kg… sur les 1 795 du poids total. Je vais être honnête, ils ne me conviennent pas du tout. Le maintien qu’ils offrent n’a aucune efficacité sur circuit et je les trouve curieusement inconfortables après seulement une heure de route. De plus, ils rendent l’entrée et la sortie plus compliquées que cela ne devrait l’être dans une routière. Je n’aime vraiment pas mais, par bonheur, si le reste de l’auto est unique, engageant et mémorable à piloter, je peux tout leur pardonner à la fin. Enfin, presque.

Je n’aime pas critiquer des engins sur lesquels des ingénieurs ont travaillé dur pendant des années pour les rendre aussi bons que possible. Surtout lorsque ce sont des Aston Martin. Mais la vérité est que (je prends ma respiration), je n’aime pas du tout cette auto, et ce n’est pas seulement pour ses baquets. En fait, au bout d’un moment, j’oublie les sièges car je suis déconcerté par le reste de la voiture, son châssis en particulier. Les baquets ne sont que le sommet de l’iceberg. Bien avant d’en prendre le volant, je m’imaginais déjà adorer cette voiture. Je me voyais chercher les mots pour exprimer mon émerveillement mais aussi ma tristesse de conduire un tel engin, sans doute le dernier de son genre. Je me voyais déjà défendre une auto qui compilerait tout ce qui allait terriblement nous manquer lorsque les surpuissantes GT à moteur V12 auront été condamnées par l’extinction de masse programmée.

… des sentiments mitigés.

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Mais en fait non. Depuis quasiment son démarrage, toutes mes belles intentions de départ se sont évaporées pour être remplacées par un questionnement profond. Mais pourquoi cette auto est-elle si rigide ? Pourquoi ne parvient-elle pas à faire corps avec la route, comme toutes les Aston depuis tant d’années ? Pourquoi son V12 biturbo n’est-il pas plus percutant à bas et moyen régimes ? Pourquoi ne chante-t-il pas mieux au-delà des 5 000 tr/mn ? Pourquoi ses pneus sont-ils si bruyants ? Pourquoi sa boîte à palettes paraît-elle aussi léthargique comparée à celles des concurrentes Porsche, Ferrari et Lamborghini pour ne citer que ces trois-là ? Mais à qui se destine cette voiture étant donné qu’elle est incapable de choisir un camp ? Je veux dire que ce n’est ni une GT car elle est trop ferme et trop bruyante pour cela, et ce n’est pas non plus une pistarde car elle n’a pas la rigueur pour se glisser parmi les meilleures du genre. Suis-je perplexe ? Oui. Je prolonge donc l’essai sur des routes connues et exigeantes au coeur du Pays de Galles. Peut-être est-ce une auto qu’il faut apprendre à découvrir sur la longueur et qui cache ses qualités loin sous le vernis superficiel. Je vais donc passer plus de 500 km à essayer de comprendre ce qu’est la V12 Vantage.

Seconde chance

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LE JOUR SUIVANT, AVEC L’ESPRIT REPOSÉ, je remonte à bord (toujours difficilement) de cette V12 Vantage pour une séance photo et vidéo à travers Elan Valley. Mais rien n’a changé. Je ne comprends toujours pas les réglages de suspension qui ne peuvent être que fermes, très fermes ou ridiculement fermes selon le mode choisi entre Sport, Sport+ ou Track. C’est par exemple terriblement plus dur qu’une Nissan GT-R Nismo pas réputée pour son confort. La direction paraît elle aussi tout aussi empruntée que la veille dans ses remontées. Par contre, je commence à m’adapter au freinage malgré un feeling initial à la pédale un peu gênant. Mais on s’y habitue et dans tous les cas, les freins fonctionnent et vous stopperez cet engin efficacement lorsque nécessaire.

En fait, le train avant ne commence à devenir cohérent qu’à partir d’un certain niveau d’attaque. Il faut donc atteindre un gros niveau de confiance avec l’auto sur ces routes étroites pour engager le nez en courbe à des vitesses insensées avec la certitude que le grip est là et que vous ne partirez pas en sous-virage jusqu’à la barrière d’en face. La poupe tient très bien le rythme la plupart du temps, en partie parce que le pic de couple n’est pas aussi dense qu’imaginé et qu’il n’y a qu’au-dessus des 5 000 tr/mn que ce V12 commence à pousser et à laisser s’exprimer ses 700 ch et 753 Nm de couple, mais aussi parce que l’ESP est particulièrement bien calibré. Il autorise un bel angle de dérive avant de gentiment intervenir en réduisant délicatement l’injection. Aucune brutalité, ce qui signifie que vous pouvez y aller franco sur l’accélérateur, bien plus que ce que vous pensiez possible, sans avoir l’impression de rouler sur un fil, même sur le mouillé. Appréciable.

Une auto maladroite

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De fait, elle se montre nettement plus rapide que toutes les Vantage avant elle, et on peut être simplement admiratif de cela. On peut l’être tout autant de l’absence quasi-totale de temps de réponse des turbos. Mais même lorsque vous vous trouvez sur de très belles routes, elle continue de se comporter de façon assez maladroite. Elle reste extrêmement rapide et collée au sol, ce n’est pas la question mais à la fin, elle ne fait rien d’autre que rouler très vite grâce à une combinaison plus ou moins grossière de grip et d’absence de roulis. À aucun moment vous ne vous sentez émotionnellement connecté à la route qui défile sous ses roues. Pour espérer ressentir quelque chose, il faut la pousser au moins à 90 % de ses capacités, ce que je ne parviens pas à faire. C’est un triste aveu après plusieurs centaines de kilomètres à tenter de trouver l’osmose.

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Le V12 5,2 litres biturbo fait 25 ch et 148 Nm de moins que dans la DBS

Ça l’est d’autant plus lorsque vous avez sous le pied droit un V12 biturbo mais, il faut bien l’avouer, ce moteur en particulier n’a jamais fait pas partie de la crème des V12. Le passage à la suralimentation lui a octroyé d’immenses quantités de puissance et de couple mais si vous ne l’associez pas à la boîte qui va bien, une partie de ce couple s’évanouit dans la transmission, ce qui a pour effet de diluer l’impression de puissance. C’est notamment perceptible à mi-régime où il paraît curieusement creux. La V12 Vantage manque de patate entre 50 et 110 km/h et même au-delà. La réponse émoussée de sa boîte automatique, peu importe le mode, ne fait rien pour le faire briller par rapport à la concurrence.

La V12 Vantage ne semble pas très à l’aise dans ses vêtements. Elle est dynamiquement trop typée circuit pour faire corps avec la route et elle n’est ni assez aiguisée ni assez rapide sur piste pour aller taquiner les meilleures du genre non plus.

C’est comme si quelque chose était allé de travers lors de sa conception. Pas son dessin, qui est magnifique, mais il y a techniquement quelque chose qui cloche, comme si certains problèmes n’avaient jamais trouvé de solution. Et l’auto elle-même est porteuse de ce malaise.

 

Elle est extrêmement rapide et collée au sol, mais la question n’est pas là

Sur circuit

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L’aileron arrière optionnel contribue pour une bonne part aux 204 kg d’appui à 320 km/h.

La V12 Vantage fait plus sens une fois sur circuit que sur route où son amortissement très ferme est problématique. De fait, ses capacités dynamiques deviennent plus pertinentes même si, là aussi, il faut approcher très près de la limite pour commencer à établir une communication avec elle. La V12 Vantage originale, voire la S ou même la GT12 qui a suivi, était nettement plus diserte et envoyait quantité d’informations dans le bas de votre dos et au bout de vos doigts.

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Étant donné qu’elle dispose de plus de puissance et de couple que ses devancières, qu’elle est équipée d’un freinage carbone et de pneus plus larges et plus efficaces, elle est évidemment plus rapide. Toutefois, sa rapidité provient surtout de sa capacité à virer à plat, à accélérer fort dans les lignes droites et à freiner tout aussi puissamment avec une facilité époustouflante. Mais elle ne se montre jamais délicate dans son comportement. Ni sur route ni sur circuit. On ne fait jamais vraiment corps avec elle. Vous visez une corde et un point de sortie et à peu de chose près, elle fait ce que vous lui demandez sans toutefois que vous parveniez à savoir où vous avez placé le pneu avant intérieur à la corde, ou le pneu arrière extérieur en sortie. Puis vous écrasez l’accélérateur et le différentiel fait de son mieux pour passer la puissance au sol et vous foncez vers le prochain virage. Puis vous recommencez.

Cela paraît très efficace et face au chronomètre, je suis certain qu’elle est impressionnante, ce que suggèrent d’ailleurs les rumeurs d’un chrono record sur la Nordschleife. Je reste toutefois dubitatif sur le fait qu’elle puisse battre une 911 GT3 PDK sur l’exercice et je veux bien manger mes cheveux si c’est le cas. Elle se montre en fait trop binaire dans ses réactions pour être rangée parmi les plus formidables pistardes homologuées route. Son extrême rigidité aurait pu faire craindre un manque de motricité en piste mais ça n’est pas le cas. Elle est plutôt douée sur ce registre, ce qui signifi e que ce qu’il se passe entre votre pied droit, le vilebrequin, le différentiel et les gros pneus arrière, fonctionne très bien. L’absence curieuse de couple à mi-régime aide aussi beaucoup. Elle ne manque pas à proprement parler de puissance mais cela n’a rien de démesuré car elle demande à être cravachée pour se montrer réellement percutante, ce qui peut paraître étonnant avec un V12 5,2 litres biturbo sous le capot.

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La bande-son n’a rien de sensationnel non plus, on s’attendait à plus expressif, notamment en choisissant les modes les plus sportifs. D’ailleurs, les changements entre les modes Sport, Sport+ et Track restent très marginaux. Mais peut-être qu’un set de Michelin Cup 2 permettrait de révéler toute la magie qu’elle cache en son sein. Quoi qu’il en soit, c’est loin d’être une Ferrari 812 Superfast.

En conclusion

Quelle que soit la vérité, il ne s’agit pas là de l’une des meilleures Aston Martin de l’histoire, ce qui, tout bien considéré, n’est rien d’autre qu’une tragédie. Peut-être est-il vraiment temps d’aborder les choses différemment à partir de maintenant. Et tout recommencer d’une feuille blanche.

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LE VERDICT
Elle est rapide
Elle est belle
Cohérence du produit ?
Suspension trop ferme
Baquets insupportables
NOTRE AVIS
3.5/5
SPORTIVES
D’OCCASION
67 900 €
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Mise en circulation : avril 2010
144 900 €
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Mise en circulation : mai 2013
154 900 €
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29 900 €
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Mise en circulation : juillet 2023
1 050 000 €
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Mise en circulation : juin 2023
 FICHE
TECHNIQUE
Moteur
V12 à 60°
Cylindrée (cm3)
5204
Disposition
Central avant
longitudinale
Suralimentation
Biturbo

CO2 (g/km)

315 g/km
Puissance (ch à tr/mn)
700 ch à 6500 tr/mn
Couple (Nm à tr/mn)
753 Nm à 5000 tr/mn
Type de transmission
Propulsion
0-100 km/h annoncé
3''5
Vitesse maximum
320 km/h
Poids
1795 kg
Prix
308 725 €
evo blanc
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